FIASCO

Par: (pas credité)


PARLER AU QUOTIDIEN DU 19 AVRIL 2001


L’anniversaire du débarquement sur la baie des cochons est celui d’un beau fiasco et les mercenaires qui voulaient, il y a 40 ans, renverser le régime castriste sont tombés sur un os. Fiasco, c’est-à-dire échec complet, et plus encore, échec cuisant. Il y a quelque chose qui tient de la gifle et de l’humiliation dans le fiasco, même si aujourd’hui le mot peut être utilisé de façon plus souple, et souvent par autodérision : « j’ai voulu m’initier au post fun-board transurbain… fiasco total ».

Le mot a une paternité littéraire et glorieuse : il est, en français, fils de Stendhal. L’aspirant milanais avait emprunté le mot à la locution italienne far fiasco : essuyer un échec, spécialement quand il s’agit d’un four, d’un échec théâtral. Aujourd’hui, on dirait (argotiquement) un bide. L’origine de l’expression italienne s’explique : fiasco, c’est la fiasque, la bouteille. Et ça aurait été le mot employé pour désigner une faute de français faite, sur les planches, par un comédien italien, du temps que ceux-ci étaient nombreux en France (l’expression date, semble-t-il, du XVIIIème siècle). On voit à quel point c’est compliqué : cette expression française, d’origine italienne, trouverait son origine en France, à cause d’un français mal parlé par les Italiens… de quoi s’emmêler les pinceaux. Le mot, en tout cas, chez Stendhal et d’autres ensuite, s’applique essentiellement à une défaillance amoureuse masculine : la panne. Et Alain Rey y voit avec une malice probablement pertinente un rapprochement avec flasque.

Le fiasco n’est pas loin du chou blanc, bien que cette dernière locution soit davantage employée comme tournure verbale : « faire chou blanc ». Ou comme exclamation dépitée : « chou blanc sur toute la ligne ». Pourquoi « chou blanc » ? On a dit que cela venait du jeu de quilles : chou blanc serait une variante de coup blanc : un coup où on n’a rien renversé, un coup pour rien. C’est plausible. Mais, n’oublions pas les images portées par le chou, légume tendre et naïf qui a une longue habitude de la peine perdue.