EPINGLE

Par: Yvan Amar et Evelyne Lattanzio

Y.AMAR : Avez-vous déjà vu des photos de Jacques Prévert ? Lui,
dont la poésie a cette apparence si désinvolte, cette apparence de
négligé artistique, était toujours "tiré à quatre épingles".

E.LATTANZIO : C'est-à-dire à la fois élégant et impeccable :
extrêmement soigné. L'origine de l'expression est compliquée et
assez obscure ...

Y.AMAR : ...Mais il n'est même pas indispensable de la tirer au
clair pour comprendre cette image, qui est évidente. L'important
est ce chiffre 4 : quatre coins pour fixer une étoffe et éviter
qu'elle ne plisse.

E.LATTANZIO : On retrouve cette épingle dans une autre expression:
"monter en épingle". On l'emploie lorsqu'un événement a connu une
publicité, un bruit qui allaient bien au-delà de ce qu'il
méritait. On dit que l'affaire est montée en épingle. Et on
déplore cette disproportion : l'expression a une valeur
péjorative.

Y.AMAR : L'origine de l'expression vient à la fois de la mode et
de la joaillerie. Il s'agissait des pierres précieuses qu'on
sertissait au sommet d'une épingle à cravate. La pierre était
ainsi mise en valeur et montrée à tous.

E.LATTANZIO : Autre expression avec épingle et qui n'a rien à voir
: imaginez le comptable d'une société mise en redressement fiscal.
Il y a eu fraude, malversation, abus de biens sociaux ... Voilà
notre comptable en mauvaise posture. Si pourtant il arrive à
prouver son innocence (ou a eu à convaincre les autorités), s'il
n'est pas inquiété, on dira qu'il a su tirer son épingle du jeu.

Y.AMAR : Et alors, il ne se fera pas épingler, c'est-à-dire
suspendre, arrêter. Mais ce verbe est nettement plus utilisé
aujourd'hui dans un sens différent : relever, remarquer un détail
ou un événement ridicule. L'épingler, c'est précisément mettre en
évidence ce ridicule.

E.LATTANZIO : Comme le dessinateur Plantu, qui tous les jours,
épingle les travers de la société ou de la politique.

Y.AMAR : C'était parler au Quotidien, une émission proposée par le
Centre National de Documentation Pédagogique ...

E.LATTANZIO : ... Et par RADIO FRANCE INTERNATIONALE.