QUITTE
Par: Yvan Amar et Evelyne Lattanzio
Y.AMAR : Quitte ou double ? C'est une formule rituelle, dans certains jeux. C'est même devenu un titre de jeu célèbre, il y a quelques années. E.LATTANZIO : La formule s'emploie d'ailleurs dans la vie courante : jouer à quitte ou double, c'est à la fois risquer gros et jouer son va-tout. C'est-à-dire "tenter le tout pour le tout" ... Ces expressions sont presque équivalentes. Y.AMAR : Au départ le mot "quitte" a un sens juridique et même commercial. Aujourd'hui encore, on dit qu'un immeuble est "quitte d'hypothèque" lorsqu'il n'est pas hypothéqué. C'est-à-dire qu'il est libre d'hypothèque. E.LATTANZIO : L'expression "nous sommes quittes" est beaucoup moins spécialisée : si nous faisons un voyage en voiture ensemble, que vous payez l'essence, mais moi le déjeuner et l'autoroute ... en gros, ces dépenses s'équilibrent : nous sommes quittes. Y.AMAR : Cette tournure est souvent ironique dans le sens : ça me fait une bonne revanche. Fernand n'a pas voulu m'inviter à son pique-nique, mais, moi qui errais lamentablement sans savoir quoi faire, j'ai rencontré par hasard son ancienne fiancée et je l'ai invitée au cinéma. Fernand, en apprenant la chose, était vert de dépit ... Nous sommes quittes. E.LATTANZIO : Dans cet exemple "quitte" est employé sans qu'une préposition le lie à autre chose. Le cas se présente, pourtant, avec l'expression "quitte pour" ... J'ai pris le train sans billet et j'ai été contrôlée, j'en ai été quitte pour une amende. C'est-à-dire j'ai régularisé ma situation en payant une amende et, somme toute, je m'en tire à bon compte. Y.AMAR : En effet, l'expression à une valeur minimisante, elle sous-entend que tout cela n'est pas trop grave. J'ai eu un accident spectaculaire, mais j'en ai été quitte pour quelques bleus, ou même quitte pour la peur. E.LATTANZIO : La locution "quitte à ..." évoque une concession : je préfère y aller à pied quitte à arriver en retard ... c'est-à-dire même si je dois arriver en retard. Y.AMAR : Mais si la phrase commence par "quitte à" le sens n'est pas le même : quitte à rater la séance, j'aime mieux finir de dîner tranquille et ne pas me presser. C'est-à-dire, puisque maintenant je sais que j'ai raté la séance, ça ne sert plus à rien de se presser. C'était Parler au Quotidien, une émission proposée par le Centre National de Documentation Pédagogique ... E.LATTANZIO : ... Et par RADIO FRANCE INTERNATIONALE.