MINEUR ET MAJEUR

Par: (pas credité)


Aux Assises de Versailles se déroule actuellement un procès dont
on nous dit (sur certains médias, ou dans les dépêches d'agence)
qu'il va juger une affaire de viol sur mineurs de 15 ans. "Mineure
de 15 ans "? On a compris qu'il s'agit d'une jeune fille de moins
de 15 ans au moment des faits. Ce genre d'expressions se répand :
mineur de moins de 15 ans, de moins de 18 ans. Sont-elles
correctes ? D'un point de vue strictement grammatical, non.
L'adjectif "mineur" ne se construit pas ordinairement avec un
complément. On devrait dire mineur tout court (= qui n'a pas
atteint la majorité légale, donc qui a moins de 18 ans selon la
législation en vigueur en France depuis 74). Ou alors, on précise :
mineur de moins de 12 ans etc., c'est-à-dire un mineur qui -
précision supplémentaire - a moins de 12 ans. Mais comme
le mot "mineur" est apparenté à l'adverbe "moins", on peut avoir
l'impression de faire un pléonasme, de répéter deux fois la même
chose si l'on dit "mineur de moins de..." C'est ce qu'on appelle
un phénomène d'hypercorrection : on fait une faute en voulant être
trop correct, et on voit le mal où il n'est pas. Pourtant, on sait
bien qu'au cinéma, on parle d'un film interdit au moins de 18 ans
(ou interdit aux mineurs). Mais la tendance hypercorrectrice gagne
du terrain.

Le couple "mineur/majeur" se trouve dans des registres bien
différents. Le vocabulaire légal, on l'a vu, où il fait référence
à l'âge et à la responsabilité. (cf. brigade des mineurs). Mais les
mots sont employés dans le langage courant : "on verra ça à ta
majorité", et même parfois dans des expressions familières comme
"majeur et vacciné" = responsable de ses actes, et, par
conséquent, qui n'a pas besoin de conseils importuns. Pourquoi
spécialement vacciné ? On ne sait pas.

"Mineur/majeur" renvoie bien sûr à l'opposition moins/plus et ils
sont de la même famille que minimum/maximum. On les trouve dans
certains emplois assez techniques, notamment en musique : les
gammes, les modes mineurs ou majeurs se définissent par rapport à
un intervalle de tierce plus ou moins grand.

Mais les deux mots ont également des emplois indépendants : on
emploie "majeur" dans le sens de "très important" : "un événement
majeur", et on trouve le mot dans l'expression toute faite : "cas
de force majeur" = qui prime sur les règlements ou habitudes, et
dégage la responsabilité de la personne concernée.

Quant à "mineur", il signifie, à l'inverse de peu d'importance :
"la chanson, un art mineur" (Gainsbourg). Et cet emploi n'est pas
forcément péjoratif : ce qui est mineur a moins d'importance que
d'autres choses, mais a une certaine importance tout de même.