ABREGE DE TOPONYMIE

Par: (pas credité)



E.LATTANZIO : Voilà qu'on fête les 700 ans de règne de la famille
Grimaldi sur la principauté de Monaco. Excellente occasion de se
demander, sinon d'où vient cette famille, du moins d'où vient le
nom de leur capitale.

Y.AMAR : Monaco ne vient pas des princes mais des moines. Le grec
"monakhos" était passé en latin d'église et le mot a alors évolué
différemment selon les environnements linguistiques où il a vécu :
Monaco, c'est logique, dans une zone sous influence italienne,
mais Munich ailleurs, ou plus exactement "Munichen" à l'origine,
qui a donné "Munchen" en allemand et Munich dans la transcription
française.

E.LATTANZIO : En France en général, la toponymie est très diverse,
lieu de mémoire enfouie, où s'inscrivent et se renouvellent les
histoires du pays.

Y.AMAR : La chrétienté évidemment est très présente, avec des
saints patrons de villes aux prénoms souvent inusités : Cloud, Lô,
Nectaire ou Flour ... D'autres formes à écho religieux : Donrémy
(Don = saint), La Trinité, Moustier, etc ...

E.LATTANZIO : Parfois, l'origine des noms est évidemment
transparente : Pontoise, Le Havre, Clermont (= mont visible de
loin). Quant à Lille, le nom a bien un rapport avec une île, bien
qu'elle ne fût entourée que de marécages.

Y.AMAR : Parfois, l'étymologie la plus connue est totalement
fantaisiste : on a cru longtemps que Montpellier était le mont des
pucelles (puellarum = jeunes filles). On sait bien aujourd'hui que
c'est faux, mais on ne sait quelle explication mettre à la place
de celle-ci : Mons Pistillarius (du petit moulin), ou Pessulanus
(du petit verrou, à cause du célèbre verrou de l'église Saint
Firmin auquel on attachait ceux qui ne payaient pas leurs dettes)

E.LATTANZIO : Parfois on ne sait rien du tout : Marseille remonte
bien à Massilia ou Massalia, mais personne ne sait dire avec
certitude à quoi correspond ce nom grec que les Phocéens donnèrent
à la colonie qu'ils fondaient.

Y.AMAR : Ou bien alors on ne connaît que la moitié de l'histoire :
Bordeaux par exemple. Est-ce le pluriel de bordel ? Tout le monde
y a pensé! Mais l'affaire est moins chaude qu'il n'y paraît :
d'abord un bordel est à l'origine une petite ferme. D'autre part,
l'appellation "Burdigala" est plus ancienne que le nom bordel dans
cette région. Il y a donc interférence entre le bordel récent
qu'on connaît, et le "burdigala" qui se perd dans la nuit des
temps.

E.LATTANZIO : Terminons avec deux remarques : la toponymie
française fait ressortir une présence gauloise bien plus
importante que dans la moyenne du vocabulaire français ( et le cas
est fréquent de cette résistance toponymique des peuples vaincus :
souvenez-vous de l'omniprésence indienne dans les noms de lieux
des Etats-Unis).

Y.AMAR : D'autre part, les villes importantes, capitales des
tribus gauloises ont souvent pris le nom des habitants, en
détrônant des denominations plus anciennes : Nantes élimine
Condevincum à cause des Namnètes (et non à cause d'un prétendu
Namnète, descendant de Japhet, et qui aurait fondé la ville trois
cents ans avant le Déluge).

E.LATTANZIO : Rennes, habité par les Redones (=ceux qui
chevauchent).

Y.AMAR : Paris élimine Lutèce et se souvient des Parisii qui y
vivent. Tant pis donc pour Lutèce qui ne dérive pas d'un vieil
adjectif signifiant "blanc" (et Rabelais prétendait que cette
blancheur était celle des cuisses des donzelles du lieu) mais
renvoie à un site marécageux.