ABUS

Par: (pas credité)


Y.AMAR : "Y a de l'abus !" Formule familière qu'on entend parfois,
bien qu'elle fasse un peu aujourd'hui argot à l'ancienne. Y a de
l'abus, c'est-à-dire, de façon vague, "il exagère" ou "ils
exagèrent".

E.LATTANZIO : "Abus" est en tout cas un mot qu'on entend
particulièrement souvent en ce moment, dans le vocabulaire des
"affaires", c'est-à-dire des scandales qui mêlent finances et
politique : abus de biens sociaux, recel d'abus de biens sociaux,
abus de crédit, mais aussi abus de confiance, de domination, de
majorité, de blanc-seing ...

Y.AMAR : Tous ces termes qualifient des délits ou des crimes et
appartiennent donc au langage juridique. Un point commun à tout
cela : on utilise une position, un pouvoir, un mandat au-delà de
ce que pour quoi il vous est conféré.

E.LATTANZIO : Ne donnons qu'une seule explication, en ce qui
concerne l'expression la plus employée en ce moment : l'abus de
biens sociaux consiste pour des responsables (de biens publics
comme de sociétés privées) à faire un usage des crédits ou des
biens de ces sociétés ou institutions contraires aux instances en
question (par exemple cinq billets d'avion pour la Guadeloupe pour
prendre des vacances en famille).

Y.AMAR : L'abus est donc un mot qui implique toujours une idée
d'excès, même s'il se fait parfois au détriment de celui qui
abuse. Cf. vieux proverbe : "il ne faut pas abuser des bonnes
choses", Cf. aussi "abus dangereux". En tout cas, cet excès est
toujours senti comme condamnable. "Tout abus sera puni", lit-on
au-dessus du signal d'alarme dans le train.

E.LATTANZIO : Cette idée d'excès condamnable se retrouve dans le
verbe "abuser", formé, dès le latin, à partir du verbe "user"
(= utiliser, se servir) auquel on adjoint le préfixe "ab-" dont les
sens sont nombreux, et qui ici sert d'intensif. Parfois les deux
verbes sont utilisés ensemble pour se renforcer mutuellement : "il
a usé et abusé des plaisirs de la vie" (formule toute faite et un
peu populaire).

Y.AMAR : Ainsi, abuser signifie souvent aller trop loin, profiter
d'une situation au-delà de ce qui est admissible : il a abusé de
ma patience, de ma générosité, de ma gentillesse = il a utilisé
tout mon crédit de patience et il a voulu aller au-delà.

E.LATTANZIO : Deux sens particuliers : "abuser d'une femme" est un
euphémisme pour signifier la violer (avec l'idée qu'on abuse de
son innocence ou de sa confiance).

Y.AMAR : "Abuser quelqu'un", c'est le tromper, là encore en
profitant de sa candeur ou de sa confiance. Et on retrouve un écho
de ce sens dans l'expression "si je ne m'abuse" = si je ne me
trompe pas. L'expression exprime qu'on est à peu près sûr de ce
qu'on avance, mais qu'on surprendra peut-être son auditoire qui ne
s'attendait pas à ce qu'on soit au courant. Mine de rien, on crée
la surprise.