DE QUOI J'ME MELE ?
Par: (pas credité)
Y.AMAR : Titre imagé et familier de toute une soirée qui s'est passée
sur la chaîne ARTE, et qui se pose ce problème crucial : les
journalistes disent-ils la vérité ?
E.LATTANZIO : De quoi je me mêle, c'est le genre de réflexion que
peut s'attirer celui qui va fouiner, ou fureter là où on
n'aimerait pas le voir. La tournure donne à penser. On voit bien
qu'elle est familière, et les catégories grammaticales s'y
mélangent : l'interrogation sert à exprimer l'exclamation indignée
la première personne tient lieu de deuxième, pour mieux
interpeller, et la menace le dispute à la remontrance.
Y. AMAR : Ce verbe mêler, qui signifie au départ mélanger,
confondre, a facilement un sens péjoratif quand il exprime que
quelqu'un est partie prenante dans une affaire. Il a été mêlé au
cambriolage de l'Avenue Trudaine, au scandale de Panama. Sans
désigner une culpabilité explicite, on sous-entend que sa position
n'est pas nette.
E. LATTANZIO : A la forme pronominale, le sens de se mêler
s'infléchit encore davantage vers celui de s'ingérer, s'immiscer.
Deux nuances sont possibles : ou bien on veut simplement être au
courant, savoir ce que d'autres aimeraient garder caché - on met
son nez dans une affaire ; ou bien on veut carrément donner son
avis et influer sur le cours des choses : on veut mettre son grain
de sel.
Y. AMAR : Dans un cas comme dans l'autre, les expressions
familières sont nombreuses pour remettre l'intrus à sa place :
Mêle-toi de tes affaires (c'est vague et neutre).
E. LATTANZIO : Mêle-toi de tes oignons - image botanique amusante,
plus familière que vraiment vulgaire, et qui pourtant doit très
probablement son origine à l'affaiblissement d'une expression plus
triviale : occupe-toi de tes fesses. (La métaphore de l'oignon est
claire).
Y. AMAR : Une autre image étonnante utilise le verbe regarder, qui
signifie concerner, lorsque son sujet n'est pas un être vivant.
Mêle-toi de ce qui te regarde ! Ca ne te regarde pas. Enfin, les
dérives sont innombrables, avec parfois des souvenirs littéraires
(Occupe-toi d'Amélie) pour se débarrasser de quelqu'un de trop
curieux : occupe-toi du chapeau de la gamine.