VALOIR/COUTER
Par: (pas credité)
Y.AMAR : Les brocantes du week-end (Batignolles) :
encore des occasions de se ruiner, de faire de bonnes affaires, de
se laisser tenter, de se demander combien ça coûte, "en vrai" ce
cloisonné douteux ou ce petit panneau sculpté, prétendu Henri II.
Car elle est bien là, la grande question : je ferai de bonnes
affaires si j'évalue bien la différence entre "combien ça coûte"
et "combien ça vaut".
E.LATTANZIO : Parfois, les deux formulations sont employées dans
un même sens : dans une boutique, on demande indifféremment
"Combien ça coûte ?" ou "Combien ça vaut, ce petit ensemble ?"
Pourtant les deux verbes ont souvent des sens différents :
"coûter" renvoie à un prix, "valoir" renvoie à une valeur.
Y.AMAR : On utilise donc coûter lorsqu'une transaction, achat ou
vente, est possible, ou simplement envisageable. "Combien ça coûte
une voiture comme ça ?" Sous-entendu, je pourrais (moi ... ou un
autre) me l'acheter.
E.LATTANZIO : Mais si je dis, l'air songeur, les yeux perdus loin
derrière les hauts murs : "Combien ça peut valoir une propriété
comme ça ?", rien n'indique que la folie entr'aperçue soit
seulement à vendre. Reste l'idée de valeur, d'évaluation.
Y.AMAR : Coûter correspond donc à un prix demandé. Valoir
correspond à une valeur réelle ou intrinsèque : "Cette bicoque m'a
coûté 100 000 F, bonne affaire : elle en vaut le double".
E.LATTANZIO : Les deux verbes s'utilisent souvent dans des
formules toutes faites, parfois symétriques, mais aux sens très
différents, par exemple, "ça ne vaut rien" et "ça ne coûte rien".
Y.AMAR : "Ça ne vaut rien" (un devoir, un livre, un homme,
un vaurien). Il s'agit d'un jugement de valeur souvent moral, très
péjoratif. La comparaison financière est souvent prolongée : il ne
vaut pas cher.
E.LATTANZIO : "Ça ne coûte rien" : deux sens principaux. Sens
propre : c'est gratuit - "J'ai été au cinéma, ça m'a rien coûté,
c'est ma cousine Angèle qui est à la caisse !". Sens figuré = c'est
pas difficile : "ça coûte pas cher de faire un sourire, pauvre
daim !"
Y.AMAR : Dernier exemple avec un pronom personnel : "ça va vous
coûter cher, mon gaillard !", "elle me coûte cher, mon envie de
framboises !". On ne pourrait pas dire : "ça va vous valoir cher !"