CRENEAU
Par: (pas credité)
Philippe Séguin vient de prendre position publiquement à propos
des débats sucités par le procès Papon. Prise de position
remarquée d'ailleurs, à propos de laquelle on a dit : "il est
monté au créneau !".
Au sens propre, un créneau est une découpe architecturale au
sommet d'une tour ou d'un mur ; cela fait partie de l'architecture
médiévale de la défense et on parle aussi bien d'une tour
"crénelée".
Le créneau permet de résister à l'assaillant tout en restant à
couvert ? Ça a un peu le même rôle que les meurtrières.
Et l'image du créneau est très fréquente dans le langage actuel :
"monter au créneau", dans un langage souvent politique, c'est
aller défendre ses positions en public, donc se donner du mal et
s'exposer. "Monter" se comprend bien (les créneaux sont en haut
d'une tour), mais l'aspect protecteur du créneau a disparu.
Mais le mot a d'autres utilisations actuelles : faire un créneau =
garer sa voiture le long du trottoir à une place laissée libre
entre deux autres voitures. L'image est évidente : le vide entre
deux voitures représente un créneau.
De là, évolution de sens : place laissée miraculeusement vide,
dans un endroit très occupé. Et on passe de l'espace au temps :
créneau horaire : pour recevoir Madame Cruchard, je n'aurai qu'un
petit créneau entre 17 h 30 et 17 h 45, entre ma réunion avec le
comité exécutif et mon tennis à St-Cloud.
Spécialement sur les médias : sur telle chaîne, le créneau 20 h-20 h 30
est réservé aux informations.
On comprend mieux comment "créneau" finit par prendre le sens de
"place libre" et "favorable" : le bon créneau sur le marché :
c'est la place qui n'est pas prise. C'est donc une idée économique
astucieuse et rentable : l'innovation téléphonique est en ce
moment un excellent créneau.