TERRE

Par: (pas credité)


20 mars : il va falloir penser à plusieurs choses à la fois - si on y arrive. Non seulement c'est la journée de la Francophonie, mais c'est aussi "la journée de la Terre" ; on embrasse large, on étreint ce qu'on peut, courage !

En tout cas, la terre a du succès, et cette journée qui lui est consacrée prouve bien que le mot roucoule à son aise dans les gorges écologiques. Et si le mot terre est devenu l'un des mots-clé du discours écologique, c'est qu'il est porteur de plusieurs idées qui sont au cœur des préoccupations écologiques. D'abord la terre est le lieu où se loge toute la vie que nous connaissons, lieu qui se saisit par rapport au système solaire, voire à l'univers… Le mot implique donc déjà esprit large et modestie. Préféré à monde, un mot qui évoque davantage l'humanité, l'histoire et la culture, la terre a les mêmes atouts positifs que "planète", un mot également très à la mode dans le même type de réflexion. Ce mot de terre indique un patrimoine dont les hommes peuvent se considérer comme les héritiers, mais aussi les gardiens. Le mot "terre" en appelle donc au respect et au bon sens : ne gaspillons pas, ne détériorons pas : "nous n'avons qu'une terre"…

Si la terre-planète est porteuse de valeurs si positives, dans sa force et sa fragilité, c'est aussi parce que ce sens se redouble d'un autre : la terre est aussi cette matière fertile, qui recouvre une bonne partie de notre globe, et fait pousser les végétaux : la terre est nourricière, et le mot appartient au monde agricole et rural (travailler la terre, une terre riche, etc.). Protéger la terre évoque ainsi un sens tout à fait matériel et biologique. Mais ça n'est pas tout : cette terre qu'on travaille est indissociable de l'idée de bon sens paysan. La terre traîne dans son sillage un parfum de concret, de solide, de matériel. Comparée aux trois autres éléments avec lesquels elle forme la donne alchimique du monde (air, eau, feu), c'est elle qui a le plus de pesanteur. Cf. par exemple l'expression "avoir les pieds sur terre" (c'est-à-dire ne pas être dans la lune, ou dans le rêve).

Cette terre se saisit donc comme ce qui est en bas, et toute l'imagerie religieuse vient accréditer cette spatialisation. Sur terre , ici-bas, on s'oppose au Ciel, à l'au-delà. Coincée entre le Paradis Perdu, et l'Autre Monde à venir, quel qu'il soit, la terre, c'est la vie même.