PASSE

Par: (pas credité)


En raison de la Coupe du Monde de football, on émet un "pass-jeunes",
valable du 1er juin au 31 juillet, qui permettra à son heureux possesseur
de bénéficier d'une réduction d'au moins 10% sur des hébergements, des
restaurants, des sites touristiques etc. Bonne initiative, mais qui pose un
problème de vocabulaire : pourquoi un "pass" ?
L'idée est claire : il s'agit de proposer un certain nombre d'avantages,
notamment des réductions financières. Un peu à la manière des cartes émises
dans les grands magasins. Mais à cette différence que ces avantages se font
valoir dans des secteurs très différents les uns des autres et dans des
endroits variés. C'est pourquoi le mot pass paraît bien choisi : une petite
carte magique qui dépannera (un peu) où que vous soyez, pendant une période
donnée. Le mot est un anglicisme, par son orthographe (a pass = une carte
de transport ; an airpass = un forfait aérien, etc.), mais il est
parfaitement homophone du mot passe, qui en français renvoie grosso-modo
aux mêmes valeurs. D'autant que passe est souvent utilisé comme abréviation
de passe-partout. Ce dernier mot signifie au départ une clé qui s'adapte à
un grand nombre de serrures, et permet par exemple d'ouvrir toutes les
portes d'un édifice. Ce mot composé, très transparent et très expressif, a
eu un grand succès. Le nom commun a pu se faire adjectif : la petite robe
noire passe-partout, qui ne vous fait remarquer ni au marché, ni au bureau,
ni au théâtre, mais qui ne dépare pas - ou l'introduction passe-partout,
qu'on peut coller, en changeait deux virgules, en tête de trois articles
différents - et là passe-partout a plutôt le sens de banal, bateau, bien
qu'utile. Mais Passe-partout s'est même transformé en nom propre :
Passe-partout est dans le Tour du monde en 80 jours, le serviteur zélé et
débrouillard de Philéas Fogg le flegmatique.
Cette aptitude à passer là, où les autres ne passent pas, se retrouve dans
un autre mot composé : le laissez-passer, qui sonne à son possesseur le
privilège d'être admis dans des lieux réservés à certains. C'est ainsi
qu'on visite une installation militaire, qu'on entre à l'Opéra par l'entrée
des artistes, qu'on monte féliciter ces dernières dans leurs loges. Et de
façon un peu analogue, on parle de coupe-fil.
Mais le laissez-passer n'est pas le passe droit, qui nous amène aux marges
de la légalité. Le passe droit, qui nous amène aux marges de la légalité.
Le passe droit n'est plus un document officiel, mais une faveur accordée au
mépris de la règle, ou de la loi : avoir le poste sans passer le concours.