A L'ITALIENNE OU A LA RUSSE
Par: (pas credité)
A l'Odéon se tient en ce moment un colloque sur les théâtres à l'italienne. Les théâtres, ou les scènes à l'italienne désignent une certaine architecture théâtrale qui, au départ, nous vient d'Italie. Mais le plus intrigant est la formule. Pourquoi à ? Pourquoi ce féminin ? A l'italienne est une ellipse de l'expression à la mode italienne, à la manière italienne, et cette tournure est d'ailleurs une spécialité que nous partageons avec la langue italienne (Cf la sonata alla turca, c'est-à-dire à la turque, que nous appelons, nous, la marche turque).
Pour renvoyer à des usages ou des choses qui, au départ, ne sont pas de chez nous, l'habitude s'est répandue d'utiliser ce genre de locution. Et elles déterminent soit un nom, soit un verbe :
- Boire à la russe (en lançant, après l'avoir lampé, son verre par dessus son épaule)
- Un baiser à la russe (sur la bouche, notamment pour les hommes)
- Question à l'américaine
- Jardins à la française (symétries de Le Nôtre) opposés aux jardins à l'anglaise, qui miment une certaine idée du naturel, avec vallonnements, points de vue surprise et salles d'ombrage…
- Socialisme à la suédoise, etc.
Ces modes sont facilement culinaires : œufs à la belge, homards à l'américaine, champignons à la grecque…
La formule sort du domaine géographique, pour pointer le style de quelqu'un, notamment en matière artistique : des traits à la Chopin, un dessin à la Greuze, un raccourci à la Tacite. Mais ce modèle prend facilement de l'extension : une conduite à la Fangio. A remarquer que les noms propres ne changent pas, qu'on n'essaie pas de les féminiser, mais que l'article féminin ne choque pas : on est habitué.
Souvent de façon un peu familière, on utilise ce tour à la … dans des locutions toutes faites qui se veulent expressives par leur côté bricolé : A la 6,4,2 (=à la hâte), à la va vite (= vite fait, bien fait), à la va comme je te pousse (sans ordre, ni méthode, ni projet), à la manque, à la noix, à la flan, etc.
Enfin, citons à la hussarde, souvent pour faire allusion à un comportement brusque et brutal, surtout dans les rapports homme/femme, et notamment avec une connotation sexuelle.