FUGUE, ESCAPADE, CAVALE

Par: (pas credité)


Fugue, c'est le mot consacré pour désigner cette action de s'enfuir du lieu où l'on vit habituellement. Ce mot suppose en outre une idée de brève durée ; la fugue est forcément courte, si elle dure 15 ans ce n'est plus une fugue mais une disparition. D'autre part, elle renvoie presque exclusivement aux abandons de domicile familial, et on l'emploie de préférence pour les mineurs et non pour les adultes.

Ces enfants ou adolescents qui s'échappent de chez eux, on les appelle des fugueurs, on dit aussi qu'ils ont fugué. Autant de mots de formation très récente qui, sans doute, ont dû être créés à cause d'une réalité nouvelle. (Le mot fugue, lui, est ancien, il vient de l'italien et il signifie " fuite " mais appliqué à un motif musical dont les parties semblent fuir dans les différentes voix (canon). Mais ce n'est qu'au XVIIIème siècle qu'il acquiert le sens qu'il a aujourd'hui).

Mais attention, il y a fugue et fugue. Si je vous dis " ce week-end, j'ai fait une petite fugue avec Lisette, il s'agit d'un tout autre genre de fugue. On insiste avec ce mot sur l'idée de séjour hors de chez soi, mais aussi sur le caractère peut-être un peu improvisé, un peu fantaisiste de la chose (= voyage organisé).

Dans ce cas d'ailleurs, on peut aussi parler d'une escapade. Le mot, comme fugue, vient de l'italien scappata au sens propre " échappée ". L'escapade suppose, comme la fugue, brièveté mais le mot est davantage lié à l'idée de plaisir. " Faire une escapade ", c'est toujours pour le plaisir, pour rompre avec le train-train routinier et s'accorder une petite parenthèse de liberté, alors que le mot fugue peut désigner aussi un geste de détresse.

Le point commun entre fugue et escapade, c'est bien sûr l'idée de fuite : on s'en va, de façon un peu précipitée, pour telle ou telle raison. Mais attention, il ne s'agit en aucun cas d'une fuite délictueuse. Un évadé de prison ne fait pas, lui, une " fugue " ou une " escapade " et s'il s'est enfui c'est, bien sûr, en toute illégalité. Dans ce cas, on va utiliser d'autres expressions, la plus courante et la plus neutre c'est l'expression verbale : " être en fuite ". Les deux gangsters qui ont commis un hold-up à mains armés à la B.N.P. sont encore en fuite.

Mais, la langue familière dispose de toute une série de formules pittoresques pour désigner ce genre de fuite. On dira dans une langue presque argotique qu'ils sont en " cavale ". D'où vient ce terme ? de " cavaler " terme populaire qui signifie " aller à cheval, chevaucher " et par extension " fuir à toute vitesse ". Le mot " cavale " venant de l'italien cavalla, féminin de cavallo, " cheval " (d'ailleurs en français poétique, un " cavale ", c'est une jument). " Etre en cavale = être en fuite pour des malfaiteurs ou des gens qui fuient d'une façon figurée pour d'autres situations plus légales.

Enfin, plus pittoresque et plus anodine " la poudre d'escampette ". Prendre la poudre d'escampette (XVIIème siècle), c'est s'enfuir de façon discrète et rapide. Escampette vient d'un verbe qui, lui, a disparu de notre langue : " escamper " qui signifiait s'enfuir. Il venait d'un verbe italien scmapare " s'enfuir du champ de bataille, d'où peut-être la référence à la poudre ; il a donné " décamper " = " quitter le camp ". Ce verbe a aussi produit le substantif escapade que nous avons vu auparavant.