FRIGIDAIRE, FRIGO, REFRIGERATEUR

Par: (pas credité)


"Frigo", bon titre pour une pièce de théâtre, même s'il n'est pas très
explicite. Est-ce bien français ? Bah ! Au moins on comprend. Alors
pourquoi en parler ? Allons droit au but ! Trois mots, "frigo", "frigidaire",
"réfrigérateur" désignent la même chose : une armoire électrique où la
température est maintenue assez basse, ce qui sert à conserver des aliments
(ou n'importe quel autre produit).

La différence entre ces mots est donc de niveau de langue. "Réfrigérateur"
est le terme admis par le bon usage, l'usage officiel. "Frigidaire" est une
marque. "Frigo" est un raccourci populaire.

Voyons maintenant le territoire de chacun des termes. L'objet est d'un
usage domestique, privé, familial. Ce qui explique que le "réfrigérateur",
même si ce n'est pas un mot "savant" ou rare, n'est pas le plus employé
des trois, loin s'en faut. Il est long : il eût fallu qu'il s'abrégeât.
Mais l'abréviation n'est pas venue. Ses deux concurrents ont donc encore la
vie belle. Un mot sur son histoire : on aurait pu le croire né avec la
maîtrise électrique du froid qui le fait succéder à l'antique glacière,
celle que son destin fait goutter et qui refroidit grâce à la vitesse
acquise (un rapprochement est à tenter entre le couple glacière/
"réfrigérateur" et le couple planeur/avion - mutatis mutandis bien entendu).
Que nenni ! Le "réfrigérateur" ne doit rien aux temps modernes et on le
croise déjà au XVIème siècle sous forme d'adjectif signifiant qui
rafraîchit. Et au XIXème , il s'attache à un appareil d'expérimentation
scientifique qui réfrigère la vapeur condensée.

"Frigo" lui est familier, ce qu'atteste ce o final, ce cautère phonétique,
si utile à tant d'apocopes. Il abrège le mot "frigorifique" ( = qui produit
du froid), mais a commencé par désigner de la "viande rouge frigorifiée"
(après-guerre de 14). Le mot ne vieillirait-il pas ? Il me semble… mais
prudence ! Tout cela est si subjectif.

"Frigidaire" est une marque de la société General Motors qui a vite débordé
les limites de son cadre commercial et qui semble aujourd'hui le mot le
plus courant à défaut d'être standard. Paradoxe : il est exclu de tout le
vocabulaire de la publicité, puisqu'il évoque la concurrence pour toute
autre marque que Frigidaire (cf. le slogan : "Frigidaire, le vrai !").
Mais reconnaissons son ancrage dans la langue : c'est lui qui s'y colle
dans les expressions familières : "mettre un projet au frigidaire" ou "cette
pièce est un vrai frigidaire".

Levons les yeux, pour apercevoir, non pas le compartiment à glace (dire
qu'on n'avait pas trouvé de mot français pour "freezer") mais aujourd'hui,
le "congélateur". Est-ce qu'on l'abrège celui-là ? "Congé", c'est pas bien
beau, mais ça s'entend… Le plus important est quand même de remarquer le
ballet des deux préfixes con- et sur- . On parle de congélateur, de
congélation, on congèle et on décongèle - et tout ça avec des surgelés !
Pas moyen de parler d'aliments congelés.