SPECTRE & COMPAGNIE
Par: (pas credité)
Après avoir saucé les plats du "fantôme", allons donc
rôder parmi sa parentèle. Et le "fantôme" ne manque pas de cousins
immatériels. Immatériels, c'est vite dit, et ce qui fait peur, c'est qu'il
en reste toujours assez pour que ça apparaisse, même si c'est de
l'insaisissable. Et qu'est-ce qui apparaît mieux qu'une apparition ? On a
aussi les ombres et les esprits, mais tous ces mots préexistent au sens de
fantôme qui n'est pas leur acception principale. Par contre, on a un
certain nombre de mots spécifiques qui signifient "fantôme" au sens littéral,
mais qui ont chacun leur sens figuré.
- "Spectre". Le mot vient du latin "spectrum", qui traduit le grec "image".
Etrangement, "spectrum" vient du verbe "specere" = regarder : c'est qu'on
regarde (comme l'apparition), et le mot est donc de la même famille que
"spectacle". Au figuré, le mot est associé à une vision d'épouvante, tantôt
évocation tantôt réminiscence : "le spectre de la guerre, de la famille", "le
spectre rouge"…
On peut noter aussi qu'un deuxième sens littéral (c'est-à-dire qui n'a
rien de métaphorique) est dérivé du premier : le spectre correspond à un
phénomène d'optique, la décomposition de la lumière blanche en une suite
ininterrompue de couleurs. (A partir de là, on a un nouveau sens figuré :
"spectre" = gamme).
- Après le "spectre", le "revenant". Le mot est facile à comprendre : c'est
celui qui revient de l'autre monde. Au sens figuré, de façon plaisante et
familière, on traitera de "revenant" un habitué qui revient après une longue
absence.
- L'"ectoplasme" a, c'est vrai, une petite histoire pré-fantomatique : c'est
en biologie l'enveloppe superficielle de la molécule et par extension une
enveloppe molle et vide. C'est ainsi qu'on appelle l'émanation visible de
l'esprit qu'un médium a convoqué.
A-t-il un sens figuré ? Ce serait beaucoup dire, mais on s'en sert
malicieusement pour parler de quelqu'un à la personnalité falote : sans
odeur, sans couleur, sans saveur.
(Et le Capitaine Haddock l'utilise volontiers comme insulte) ;
- Terminons à Haïti, avec les "zombies". Ce dieu-serpent du vaudou peut
paraît-il ressusciter les morts, au moins pour quelques temps. Le mot se
transfert aisément au mort vivant lui-même et passe en français (via
l'américain ?) avec un parfum exotique et pittoresque. Mais il poursuit
sa carrière en prenant un sens figuré : un "zombie" est quelqu'un qui a l'air
totalement absent, perdu dans ses pensées, ou un reste de sommeil.