GUIGNOL
Par: (pas credité)
Le dixième anniversaire d'une célèbre émission parodique et politique de
télévision fait parler de lui plus souvent qu'à son tour. Enfin, le
jugement est subjectif, mais de longues compilations ont été diffusées,
après qu'une campagne publicitaire musclée ait rappelé les formules plus ou
moins célèbres, insolentes et parfois drôles dont "Les Guignols de l'info"
ont émaillé la vie politique. ("A l'insu de mon plein gré" m'a bien fait
rigoler). En attendant, on peut parler de ce mot "guignol".
Chacun sait que "Guignol" est le nom du personnage principal d'un théâtre de
marionnettes lyonnais. Si c'est un art populaire, ce n'est pas un art
anonyme, et en gros, on en connaît l'histoire. "Guignol" est un produit
d'exportation. On peut remonter sa trace jusqu'en Chine. Imité, il se
taille son succès en Italie, avec les "pupazzi". Laurent Mourguet,
charmé, reprend l'idée et installe son théâtre à Lyon, rue Noire, en 1795.
Succès. Le bruit courut que le nom de "Guignol" venait de l'exclamation
favorite d'un de ses amis : "C'est guignolant !". Faux. On a dit encore
que c'était le nom véritable d'un canut authentique et populaire. Douteux.
"Guignol", c'est plus probablement celui qui cligne de l'oeil (du verbe
guigner).
En tout cas, le mot a eu une belle carrière. Le "guignol" est, par excellence,
la forme du théâtre de marionnettes pour enfants, désignant au-delà du
personnage le théâtre lui-même et son style. Le mot a même désigné, dans un
jargon de théâtre aujourd'hui sorti d'usage, une petite guérite qu'on
pouvait installer n'importe où dans un théâtre, et où se glissait l'auteur,
qui sans être vu, pouvait assister aux répétitions de sa pièce.
Mais "guignol" est devenu synonyme de "bouffon", personnage ridicule et
dérisoire à qui il ne faut pas accorder de crédit. Le souvenir de la
marionnette a fait que souvent on appelle "guignol", quelqu'un qui gesticule
beaucoup, qui remue beaucoup d'air. Et en fait, la proximité avec le mot
"mariolle", petit escroc fourbe et rusé qui contrefait la Marie
(c'est-à-dire la Sainte Nitouche) y est peut-être pour quelque chose.