JEANS et PANTALONS
Par: (pas credité)
Il paraît qu'on licencie beaucoup dans le monde du jean. Mais qu'est-ce que
c'est que ça? D'abord l'abréviation de "blue jeans", une expression
américaine qu'on emprunte au milieu des années 50 (le mot et la chose). Ces
pantalons de travail, en grosse toile bleue, commencent à être très à la
mode, évoquent avec le chewing-gum la tendance proverbialement décontractée
des Américains, et l'accès à une vie de consommation censée libérer par
l'uniforme l'homme, la femme et les petits enfants. Le succès du mot fait
plaisanter Queneau ("bloudjinze", ou même "bloudgine", et "blougine") mais le
terme s'installe durablement.
Le mot "jean" a désigné petit à petit toute une série de pantalons de coupe "sport",
en même temps qu'il s'est désolidarisé de son adjectif de couleur : on
parle d'un "jean marron" ou d'un "jean de velours". On notera que le mot perd
souvent son "s", qu'en tout cas celui-ci n'est pas toujours prononcé. Mais
le plus étonnant est le rapport orthographe/prononciation qui ne correspond
à rien d'autre en français et reste calqué sur l'habitude américaine. On
peut même relever des dérivés commerciaux qui attestent que cette habitude
s'est bien installée en français, ainsi que l'enseigne de la "Jeanerie".
L'étymologie du mot est inattendue car très européenne : les premiers "jeans"
ont été faits à partir d'une toile que les Anglais importaient via le port
de Gênes, à partir du XVIème siècle.
L'actuel succès du vêtement fait, pour préciser, qu'on parle bien du "jean
original" - ce pantalon en grosse toile, on a emprunté un autre mot à
l'américain : "denim", qui, bizarrement vient également d'Europe. Il s'agit
d'une autre ville, celle de Nîmes en France, autre origine de ce genre de
toile.
Ces néologismes au parfum de ketchup ont fait du même coup vieillir tout un
tas de mots familiers ou argotiques pour désigner le pantalon. Ce mot
lui-même n'est pas si ancien que ça : on sait qu'il désignait d'abord un
personnage de la comédie italienne - vieil avare ridicule, vêtu d'ailleurs
de ce genre de "salopette". Le mot commence à s'employer vers le XVIIème siècle
mais c'est après la Révolution qu'il se banalise et se répand ; la "culotte"
avait vécu ; les "chausses" regardaient vers le passé.
Quant à la glose familière du "pantalon", elle nous propose par exemple le
"grimpant" - une image qui s'explique toute seule.
"Froc" a changé de sens en changeant de niveau de langue. D'abord "manteau", il
devient l'habit de moine, puis argotiquement le "pantalon".
Quant à "falzar" et "futal", leur origine est inconnue mais leur prononciation
a une vraie saveur populaire.