BIO
Par: (pas credité)
Le salon Biovision a ouvert ses portes récemment (le 26 à Lyon). Biovision ! Pensez un peu, on n'allait pas s'en priver. Ce salon a un sous-titre plus ou moins éclairant : premier forum international des sciences du vivant. C'est dire qu'on nous propose tout à la fois une vision panoramique sur le bio et une vision bio du monde.
"Bio" est donc un nom, un adjectif ? Dans son usage actuel et jargonnant, oui, plus ou moins. Et il évoque le naturel, l'écologique, le sain. Le sens est plutôt vague et fait penser globalement à une façon de retrouver un accord harmonieux avec la nature, au-delà de toutes les pollutions et métamorphoses liées à la technologie moderne. Et au-delà de la simple référence à la nature, ce préfixe fait allusion à des énergies terriennes, voire cosmiques, avec lesquelles il faudrait se remettre en phase (on oriente son lit vers Vesoul, on est sensible aux mauvaises vibrations du radiateur, les montres à quartz vous donnent de mauvais rêves). Le mot n'a rien de vulgaire, mais ainsi abrégé (car il dérive de "biologique", on va le voir), il sous-entend comme une connivence entre celui qui l'emploie et celui qui l'entend. On va comme ça, le samedi matin, au marché "bio", c'est-à-dire où l'on vend des produits issus de l'agriculture "biologique". Et même si tout le monde sait qu'il s'agit d'un langage un peu relâché, et soumis aux caprices de la mode, il arrive d'entendre des phrases telles que : "il est assez bio, il mène une vie très bio, on a passé des vacances super bio". On est donc tenté de guetter ses biorythmes, cycles occultes en rapport avec les marées, les éclipses, les planètes et l'éternel retour du tiers provisionnel. On n'achète que des sacs biodégradables faits dans des matières que les micro-organismes peuvent détruire.
Et tout cela dérive de la biologie, une science assez récente, puisque le mot n'apparaît qu'en 1802, mis au goût du jour épistémologique par Lamark. La discipline a d'abord été globalisante, regroupant toutes les études des êtres et phénomènes vivants, y compris la zoologie et la botanique. Quand des dernières disciplines ont pris suffisamment d'importance pour être totalement autonomes dans le champ scientifique, la biologie s'est spécialisée dans l'observation de la vie même dans ce qu'elle a de plus spécifique, à travers ses manifestations les plus isolables, et donc les plus ténues; tissus, cellules. On parle ainsi de biologie cellulaire, moléculaire, etc.
Le préfixe a eu tant de succès qu'il a même servi à composer le nom d'un héros transformable, aux pouvoirs imprévus, qui hante une bande dessinée japonaise : Bioman qui, par un retournement plaisant, dans l'argot des jeunes, désigne parfois le père (celui qui vous a donné la vie) : "Mon bioman, hier, il n'était pas de bon poil, il ne fallait pas lui marcher sur les pieds.