PROTECTORAT

Par: (pas credité)


Il s'agirait d'impliquer l'ONU dans une sorte de "protectorat international".
L'idée a été émise par Eryk Derycke, chef de la diplomatie belge, et elle est
bien révélatrice des hésitations diplomatiques et conceptuelles que secrète la
guerre au Kosovo. Le conditionnel est de rigueur et on sent qu'on marche sur
des oeufs.

C'est que les mots ont tout un passé, parfois lourd. Qu'est-ce qu'un "protectorat" ?
La réalité historique que le mot recouvre est probablement bien différente de ce qu'a
dans la tête Monsieur Derycke.
Le terme de "protectorat", en ce qui concerne la langue française et l'Histoire de
France, appartient à l'histoire coloniale. Un "protectorat" est un pays protégé par un
pays protecteur. Il conserve donc une identité propre, et même souverain.
Quant à sa souveraineté, c'est plus douteux. Le pays protecteur contrôle la politique,
l'administration et l'économie du pays protégé, et assure sa protection intérieure et
extérieure. Le système concernait un très grand nombre de pays de l'Empire :
Cambodge (1863), Tunisie (81), Annam (83), Madagascar, Laos,
Maroc. De tous ces pays, De Gaulle n'aurait pas pu dire, comme il le fit de l'Algérie,
c'est la France. Ce n'était pas la France, ni des départements. Le mot a été utilisé pour
des histoires non coloniales, en particulier, avec le protectorat de Bohème-Moravie
"protégée" par Hitler entre 1939 et 1945.

En fait, c'est parce que le mot sentait son histoire coloniale et dominatrice qu'il a été
évité à la fin de la Première Guerre : Woodrow Wilson et les Américains (anciens
colonisés) n'en voulaient pas. C'est alors qu'on recourt au terme de "mandat". Mais ce
dernier terme recouvre lui aussi un lien de domination. Il s'agissait pour les
vainqueurs de se partager les territoires anciennement contrôlés par les vaincus,
l'Empire colonial allemand et les territoires arabes de l'Empire ottoman. On avait
pourtant une caution internationale : il s'agissait de régimes provisoires, de tutelles
placées sous le contrôle de la SDN.