AN ET ANNEE

Par: (pas credité)


L' "an" 2000, c'est pour bientôt. On en parle assez pour qu'on s'arrête quelques secondes sur cette dénomination : pourquoi l' "an" 2000, et pas 2000 simplement, d'autant qu'il y a une ambiguïté possible avec la formule "en" 2000. Pourquoi l' "an" 2000 et pas l' "année" 2000 ? Et quelle différence fait-on entre "an" et "année" ?

L'expression l' "an" 2000 a une charge symbolique importante, c'est évident. Techniquement, on ne change ni de siècle ni de millénaire (c'est pour 2001), mais le passage d'une ère à l'autre va se faire là quand même.

D'ailleurs, cet "an" 2000 change de face au fur et à mesure qu'il se rapproche. Pendant longtemps, disons la majeure partie du XXème siècle, il a symbolisé l'avenir, de façon un peu futuriste, un peu comme un avenir de science-fiction auquel on faisait une référence fantasque et imaginaire. Jusqu'au premier traiteur de luxe ouvert jusqu'à 2 heures du matin qui, dans les "années" 50, s'appelait déjà "À l'an 2000". C'est que bizarrement ce mot "an" qui, dans cette expression, est résolument tourné vers l'avenir est un mot assez archaïque, qu'on trouve en français d'aujourd'hui dans des formules figées qui fleurent bon le passé : l' "an" 2000 est un calque de l' "an" mil. Aujourd'hui, pour parler des millésimes, on parle d' "années" : "l'année 1967 a été bonne pour le Bordeaux"…

Mais jadis, on parlait d' "an", voire, dans une langue plus marquée qu'aujourd'hui par la préoccupation religieuse, d' "an de grâce". Mais, cet usage se retrouve pour le calendrier révolutionnaire ("Ô soldats de l'an II"…), et s'est transmis lorsqu'il s'agit d'entamer une nouvelle ère (Cf. le film "L'an 01").

Mais, on trouve également ce mot "an" lorsqu'on est à la frange de deux "années" : "le nouvel an", "le jour de l'an", "au gui l'an neuf", etc. Ou dans de vieilles expressions du genre "bon an mal an" qui signifie en gros, l'un dans l'autre, si l'on fait la moyenne entre les bonnes et les mauvaises "années".

Mais, il serait faux de penser que le mot "an" est réservé à des expressions toutes faites : c'est encore un mot très usuel et très vivant qu'on emploie tout le temps. Alors quelle est la différence de sens qui le distingue de son doublet "année" ?
Et bien, comme c'est souvent le cas en français, il n'y a pas vraiment de règle, mais des usages variés.
On peut quand même noter quelques grandes tendances : "année" pointe davantage un contenu, une durée, alors que "an" s'utilise plus pour marquer l'âge ou l'écoulement du temps.
Pour l'âge, c'est évident : "il a trois ans", "il a quarante ans", etc.
Pour dater, marquer le temps qui s'écoule : "depuis trois ans", "dans dix ans", "dans trois cents ans", "j'ai vécu douze ans à Bécons"…

Mais voyez comme c'est une question d'habitude et non de bon sens : il suffit d'une préposition pour tout faire basculer : on dit "il y a 300 000 ans" ; "il y a trois millions d'années"… mais on ne dirait jamais "il y a trois millions d'ans". De même, on dit "une dizaine d'années", et non "une dizaine d'ans".