CAPITAL

Par: (pas credité)


L'anniversaire d'un magazine réputé, ça se célèbre : "Capital" a dix ans. Révélateur ? Peut-être d'une certaine oscillation des modes. Ce magazine en tout cas, dont le nom se fait l'écho du célèbre "Fortune" américain, apparaît à un moment où le terme "capital" n'est plus diabolisé comme il l'a été durant des années. En effet, les mots de cette famille ont été presque tabou pendant toute une époque, en particulier de la fin de la guerre au milieu des années 80. On ne les utilisait que pour les stigmatiser. Depuis 10-15 ans, les choses ont bien changé : on le sait, on a assisté à la chute des régimes communistes de l'est, quelques années après qu'en France on eût assisté à "l'alternance" : la gauche n'était plus dans l'opposition. Ces deux phénomènes inverses ont eu un effet inattendu : la droite osait se dire la droite : le libéralisme osait se revendiquer comme tel ; et "capital", "capitalisme", "capitaliste" devenaient autre chose que des mots sulfureux ou insultants.

Alors qu'est-ce que le "capital" ? Le mot dérive d'un terme latin désignant la tête. Et dès le XVIème siècle, dans un emploi que les Français empruntent aux Italiens, le "capital" est la partie la plus importante d'un bien financier. D'abord, le "capital" représente l'argent qu'on a emprunté : c'est la dette qu'on rembourse, à l'exclusion des intérêts. Et le mot dans ce sens est en concurrence avec principal -c'est la partie principale de ce qu'on doit rendre. Cf. La Fontaine : "Je vous paierai, lui dit-elle/Avant l'août foi d'animal/Intérêt et principal".
Le "capital", bien vite, a aussi désigné la somme investie dans une entreprise, sans qu'aucun caractère péjoratif s'attache au vocable.

Mais enfin Marx vint. Le "capital" est publié en 1867, et le mot y prend un sens particulier : c'est la richesse considérée comme moyen de production. A partir de là, on va opposer "capital" à travail, "capitaliste" à prolétaire, "capitalisme" à socialisme. Les bases de tout un vocabulaire sont jetées, avec certaines expressions plus saillantes que d'autres : le grand "capital", "capitalisme" sauvage, etc.

Au sens figuré, de façon bien plus récente, le mot "capital" est employé, souvent en domino avec une apposition, dans le sens d'un avoir qu'on a au départ, qu'on ne doit pas gaspiller, et éventuellement faire fructifier, ou tout au moins conserver en bonne condition le plus longtemps possible : "capital-santé", "capital-beauté", ou même "capital" de confiance, de sympathie.