CRAQUER
Par: (pas credité)
"Je craque !" Slogan qu'on a vu partout sur les murs parisiens, avec en effigie, un beau jeune homme un peu niais, et dont on sent qu'il a cédé à une folle impulsion de consommateur effréné. L'idée est donc celle d'un désir longtemps réprimé, dont la bride se rompt soudain.
Mais ce sens n'est pas le premier, tant s'en faut.
Le mot est d'origine germanique, non latine. Sa naissance a bien sûr à voir avec un pléonasme expressif, mais cette expressivité n'a rien d'universel.
Le premier sens est celui d'un claquement du bec d'un oiseau, puis celui d'un bruit sec indéterminé, avant que le verbe ne signifie rompre, faire se rompre avec un tel bruit. On en arrive donc au sens de se défaire, se briser (Cf. "plein à craquer").
Mais l'évocation sonore contenue dans le mot va amener une nouvelle spécificité : ce qui "craque", c'est notamment le tissu, le long d'une longue ligne de fracture (crrrrraac...). Ce peut être un sac qui cède sous un excès de poids, ou une veste, un pantalon, si l'impétrant qui a grossi, a un mouvement malencontreux. Mais si nous sommes encore dans le littéral avec tout ça, le figuré pointe le bout de son nez :
"Craquer", c'est ne pas tenir le coup : les barrières de la censure s'effondrent subitement, comme cède un barrage : "je craque" évoque un effondrement nerveux : je ne me maîtrise plus, je n'assure plus.
Et c'est à partir de là qu'on embraye sur le sens évoqué au début : céder à un désir ; ne plus dire non, ne plus se censurer, ne plus interdire ("j'ai craqué" : j'ai acheté ce petit ensemble...). C'est parfois utilisé pour dire qu'on n'arrive pas à respecter une règle, à tenir une contrainte : "j'ai craqué", j'ai acheté un macaron au chocolat, j'ai fumé une cigarette.
Et l'adjectif "craquant" a encore un autre sens, et exprime l'image même du charme : "Lisbeth me fait craquer" ; "la petite Ginette est craquante", c'est-à-dire qu'elle est irrésistible.