GYNECO

Par: (pas credité)


Touche pas à mon "gynéco" ! C'est ce slogan ravageur qui a rassemblé, la semaine dernière, toutes celles et tous ceux qui craignaient que certaines spécialités médicales n'aient du plomb dans l'aile, et notamment la "gynécologie". Le creuset du slogan nous est familier, depuis le célèbre "Touche pas à mon pote !", souvent imité, jamais égalé.

Mais c'est le "gynéco" qui nous intéresse. Abréviation de "gynécologue", selon une formule courante quand il s'agit de nommer des médecins, à la fonction parfois longue à prononcer : cardio, ophtalmo, oto-rhino, rhumato : … le pli es pris, on s'arrête à l' "o".

Le "gynécologue" s'occupe donc de "gynécologie", c'est-à-dire des maladies de la femme. Ou sinon des maladies, du moins de sa santé, en ce qui concerne des domaines spécifiquement féminins, de la grossesse à la mammographie. Le mot apparaît vers le milieu du XIXème siècle.

D'autres mots sont formés sur la même racine, comme "gynécée", qui désigne chez les anciens Grecs et Romains, les appartements réservés aux femmes. Nous sommes là bien sûr dans les familles patriciennes, et donc riches. Le "gynécée" des Grecs était placé à l'arrière de la maison, et se composait ordinairement du thalamos (la chambre nuptiale, où l'époux était attendu sans que ce soit forcément sa chambre ordinaire), de l'amphithalamos (la chambre des filles) et de diverses dépendances pour les esclaves. Ce "gynécée" fait évidemment penser au sérail ou aux harems orientaux. Mais, à la différence de ces derniers, ils n'impliquent ni la réclusion, ni la polygamie. Le mot de "gynécée" est parfois utilisé aujourd'hui de façon métaphorique, pour désigner une atmosphère très féminine, un endroit où, par hasard et non par structure, n'habitent que des femmes. "Entre ses deux sœurs, sa mère et sa tante, il a été élevé dans un gynécée…"

Le symétrique de gunaikos est andros, l'homme. Symétrique vraiment ? Presque, pas tout à fait puisque deux mots existent en grec pour dire homme : anthropos et andros. Mais le premier est beaucoup plus générique, et désigne l'être humain en général, bien qu'il soit masculin, ce qui ne laisse pas d'être ambigu quant à l'utilisation qu'on en fait. Mais andros (ou plutôt aner, au nominatif) insiste sur le côté mâle.

On a donc utilisé les deux racines pour créer le mot "androgyne", qui s'applique aussi bien à un homme qu'à une femme, à un garçon qu'à une fille, dont l'apparence et les caractéristiques sexués ne sont pas très apparents. C'est le charme trouble de l'entre-deux qui fait qu'une frêle jeune fille aux formes peu marquées a de faux airs de jeune garçon, ou qu'un mince jeune garçon a une grâce de jeune fille.

Une curiosité en passant : le mot "gynandre" a existé pour désigner une plante dont les étamines étaient insérées dans le pistil, et qui donc présentait des caractéristiques aussi bien masculines que féminines.

Et cette racine "andre" se trouve aujourd'hui dans des mots techniques (andropause, sur le modèle ménopause) ou jargonneux : misandre est symétrique de misogyne. Les deux mots s'appliquent à ceux (celles…) qui détestent les hommes ou les femmes. Ils se différencient de misanthrope, où l'objet de la haine n'est pas sexué.