TROP

Par: (pas credité)


« Retrouve ta bande dessinée favorite, avec des personnages trop sympas ». C’est tiré d’un document publicitaire destiné à des enfants, et, visiblement, cette prose imite un certain langage enfantin , et en particulier une certaine faute enfantine, liée à l’usage de l’adverbe « trop ».

« Trop sympathique », c’est-à-dire très sympathique, extrêmement sympathique, furieusement sympathique… On voit que les équivalents ne manquent pas, et qu’ils sont liés, souvent, à des effets de mode.

« Trop sympathique » n’est donc pas a priori plus blâmable qu’autre chose. Mais l’expression est liée à un glissement de sens. « Trop », au départ est lié à l’idée d’excès : un pantalon trop long, trop court, trop cher…

De l’idée d’excès, on est passé, assez naturellement à celle de grande quantité, et non seulement de trop grande quantité. Le tout dans un souci d’être expressif, d’en dire un peu plus que ce qu’indique le simple sens des mots.
Cet effet de mode succède à un autre, qui consistait à employer « trop » à la manière d’un adjectif, alors que c’est un adverbe. On retrouvait ainsi le mot en situation d’attribut ; « celui-là, il est trop ». Cela évoque l’admiration, et parfois la critique. En tout cas, ça exprime la surprise : « William, il est trop, avec ses chaussettes jaunes et son pull rouge. Comprenez : il est un défi ambulant au bon goût. Cette façon de dire a été employée à l’américaine, où depuis longtemps, on dit de quelqu’un : « he is too much ». Ce qu’on a parfois traduit à moitié, dans un curieux sabir bilingue : « celui-là, il est too much ». Cette mode est déjà presque passée. Celle du copain « trop sympa » sera-t-elle aussi éphémère ? Trop tôt pour le dire, mais c’est probable.