CONTREBANDE
Par: (pas credité)
Jazz contre band. C’est le nom bizarre et plutôt bien choisi que s’est donné un festival musical qui se déroule dans 7 communes différentes : 4 en Suisse et 3 en France. Jeux de mots, bien sûr, et à tiroirs : « Jazz contre band », car « band » est un orchestre, en anglais, et donc dans les milieux du jazz. (Mais, le mot n’est pas seulement un anglicisme : une « bande », en français, a longtemps signifié un orchestre, une « bande » de musiciens – cf la petite « bande » des frères Kuijken). Mais, ce « contre band » se comprend aussi en un mot : « contrebande », puisqu’on fera passer la musique au-dessus de la frontière, comme on fait de l’or ou du chocolat.
Et c’est bien ça la « contrebande » : faire passer une frontière illégalement à des marchandises. Soit elles sont prohibées, soit elles n’ont pas le droit de traverser cette frontière, soit simplement, on évite de les déclarer, et de payer les taxes. Dans tous les cas, on a pris ses distances avec la loi.
Et faire de la « contrebande », c’est mot à mot, agir contre le « ban ». Le mot vient de l’italien (contrabbanda), mais pour comprendre son évolution, il faut remonter à ce très vieux mot germanique, « ban », dont le premier sens est défense, interdiction, et par extension loi, règle. Le mot « contrebande » est donc assez ancien (XVIème siècle), a désigné cette pratique illicite, puis les marchandises qu’on faisait passer en « contrebande » (Cf Rimbaud : C’est de la « contrebande »…). Mais, les « contrebandiers » appartiennent au passé ou à la légende: chemins de muletier, nuits sans lune, ballots sur l’épaule, c’est tout un roman qui rend toujours le « contrebandier » sympathique et le douanier obtus.
Les images et les mots d’aujourd’hui sont bien différents.
Si l’on considère que c’est accro à la loi est occasionnel, qu’en tout cas, on n’en fait pas une profession, on parlera de « fraude ». L’appareil photo qu’on ramène des Etats-Unis, le singe du Maroc, la statuette du Cambodge, en cachant ça dans un coin de sac à dos, sont passés en fraude. C’est interdit et la pratique est délictueuse, certes. Mais c’est ponctuel, ce n’est pas un mode de vie. Et d’ailleurs, il est rare qu’on appelle celui qui s’en rend coupable un fraudeur (un fraudeur fraude le fisc avec sa déclaration d’impôts, ou la RATP en passant sous le portillon).
Il en va bien différemment du « trafic » et du « trafiquant ». Le « trafic » se fait à une autre échelle, et dans un but commercial, pour revendre et non pour se faire plaisir à soi. Et il sous-entend, bien sûr, une préméditation et une organisation qui outrepassent largement les frissons individuels de la « fraude ».