MAFIA
Par: (pas credité)
La lutte contre la « mafia » s’intensifierait-elle ? Deviendrait-elle plus efficace ? C’est à souhaiter, comme il est à souhaiter qu’elle puisse s’opérer au grand jour, sans peur et sans honte.
Il est vrai que le mot de « mafia » est mystérieux comme la chose qu’il désigne, et qu’il cache souvent ses noirs desseins sous des oripeaux romanesques.
Tout ça apparaît vers le milieu du XIXème, en Sicile. Mythe ou réalité, il semble que cette organisation secrète se soit d’abord constituée autour de « bandits d’honneur » : ceux qui échappent au code civil, à la loi commune parce qu’ils prétendent défendre un autre code, une autre loi, orale et ancestrale. C’est tout un ordre social qu’on récuse : pas de citoyen, pas d’état ; pas même de sujet ni de roi ; la famille, encore la famille, toujours la famille et toute une organisation sociale clientéliste qui en découle. Un ordre à peine féodal qui aide à comprendre (comprendre ? disons constater) que le mot de « mafia » évoque au départ des notions chevaleresques : grâce, allure, audace… Tout ça d’après Alain Rey, bien sûr. L’organisation ayant prospéré, et même, mutatis mutandis, essaimé aux Etats-Unis, le phénomène et son lexique ont franchi les barrières de la langue italienne avec une élégance de gazelle surentraînée.
Ainsi, en France parle-t-on sans s’émouvoir de « mafia » (ou de maffia), de « maffiosos », ou de « maffiosi » : le pluriel à l’italienne fait plus authentique et plus exotique. Pourtant, le mot s’est si bien adapté qu’on utilise couramment en français l’adjectif « mafieux », pour désigner une organisation ou un type de rapport copié sur le modèle de la « mafia » : protection/extorsion : les deux faces de la monnaie « mafieuse ». Mais, le parrain s’est traduit (de même le godfather américain), pour exprimer le grand patron, omnipotens pater familias.
Et tout ça repose sur l’omerta, sacro-sainte loi du silence. Le mot est, paraît-il, une forme dialectale d’umilita – l’humilité, qui impose de ne pas parler aux étrangers, et surtout pas aux autorités : les deux mains sur la bouche, sur les yeux, sur les oreilles.