AVALER SON CHAPEAU
Par: (pas credité)
Roxane Decore a-t-elle « avalé son chapeau » avec la ficelle quand elle a appris que Philippe Séguin se présentait à la première place de sa liste aux élections municipales ? C’est ce qu’imagine le quotidien Libération, qui suppute que la candidate, rétrogradée de fait à la deuxième place, a dû en éprouver un certain dépit, qu’elle a malgré tout été contrainte de cacher.
Elle aurait donc « avalé son chapeau », comme elle aurait pu avaler la pilule, ou avaler des couleuvres. Ces deux expressions sont, en effet, assez voisines pour leur sens : il s’agit de supporter, sans protester, sans se plaindre, en feignant même la bonne humeur, des affronts ou des humiliations. Pourquoi la pilule ? Parce que les médecines sont censées être mauvaises au goût, pour être efficaces. C’est faux, bien sûr, mais c’est ce qu’on dit.
Et pourquoi « avaler des couleuvres » ? Ce serpent est inoffensif, mais c’est malgré tout un serpent, sinueux et gluant, qui évoque peut-être l’hypocrisie et le mensonge. Cette valeur péjorative est renforcée par la proximité du mot couleur. Faire « avaler des couleurs » alors ? Cela signifiait faire croire des choses fausses, inventées ; peintes ? comme des couleurs ? C’est peut-être l’origine de l’expression, aujourd’hui sortie d’usage. Mais, les couleurs étaient des mensonges, des sornettes. Un sens dont on sent la trace dans l’expression « sous couleur de… »
Quant à « avaler », l’image est évidente : il s’agit d’ingérer, d’accepter quelque chose. On peut l’avaler, mais aussi ravaler sa fierté, son orgueil, sa fureur, quand, au dernier moment, ce sentiment est sur le point de s’exprimer, on l’étouffe et le rentre au plus profond de soi : on le ravale.