CRUE DU SIECLE
Par: (pas credité)
PARLER AU QUOTIDIEN DU 29 MARS 2001
Encore une « crue » du siècle ! La précédente n'était pourtant pas bien vieille, mais il paraît que ces « crues » se multiplient. Ou bien la météo se dégrade, ou bien c’est la pratique de l’hyperbole qui se généralise. Il faut dire qu’un nouveau siècle venant de commencer, on peut en profiter : la dernière fois que vous avez trop bu, c’était déjà la cuite du siècle. Ça ne durera pas.
Revenons à notre « crue ». Cette âpre et sympathique monosyllabe désigne le gonflement d’un cours d’eau : on parle de « crue » quand le niveau de l’eau monte sensiblement, de « décrue » quand il redescend. Et, en effet, le volume d’eau croît, puis décroît, c’est-à-dire augmente puis diminue.
Et le nom « crue » dérive bien du verbe croître. Mais il mène sa vie propre depuis le XIIIème siècle déjà.
On a des « crues » chaque année, généralement en hiver et au début du printemps, lorsque les cours d’eau sont alimentés plus que de coutume par de grosses précipitations ou par la fonte des neiges. Et certaines « crues » font date (Paris 1901). On rappellera, au passage, la fonction traditionnelle du zouave du Pont de l’Alma qui sert de jauge.
Si la « crue » outrepasse le sens commun, ça déborde. C’est l’inondation – ce qui vient de se produire en Bretagne.
Ce mot d’ « inondation », sagement construit à partir du verbe latin inondare, fait bien entendre sa racine onde : c’est de l’onde qui s’oublie en quelque sorte. Mais, le mot ne s’emploie pas uniquement lorsqu’un fleuve déborde de son lit.
On parle également d’ « inondation » lorsqu’à la suite de pluies excessives, l’eau a recouvert ce qui d’ordinaire est au sec : champs, rues, routes, maisons même… pour traduire ce que, de façon plus officielle et administrative, on appelle dégâts des eaux : dommages occasionnés dans un appartement par une fuite d’eau.
Et le mot « inondation » s’est aussi employé, au Moyen-âge pour désigner le déluge biblique : « la grant inondation ». Bien que le mot ne s’emploie plus dans ce sens, on en profitera pour préciser ce dernier terme . Si l’on met la majuscule, on se réfère à la légende de la Genèse.
Sinon, on parle de « déluge » à propos de pluies très fortes. Sur « déluge », on a formé l’adjectif « diluvien », qui qualifie une grande intensité de pluie (presque toujours au féminin, car qualifiant le mot pluie). Et sur « diluvien », on a formé « antédiluvien », (= qui date d’avant le « déluge ») qui renvoie de façon imprécise et, en général, plaisante à un événement très ancien, ou à un objet à l’aspect très antique : « un véhicule antédiluvien ».