OUEST - CARREMENT A L’OUEST
Par: (pas credité)
PARLER AU QUOTIDIEN DU 6 JUIN 2001
Carrément à l’ouest. Titre d’un film de Jacques Doillon, qui vient de sortir. Et qui se jette sur une expression assez récente (enfin je l’ai entendue, pour la première fois, il y a au moins quatre ans) : il est à l’ouest. C’est-à-dire, il n’y est pas, il n’a pas les pieds sur terre, il est dans les nuages, déconnecté des réalités. C’est bien l’image de l’ailleurs : il est loin. Mais pourquoi à l’ouest, plutôt qu’à l’est, au sud ?… etc.
D’abord, on a gardé l’idée, héritée d’Amérique, que la frontière de la civilisation, celle qu’on repousse par la conquête, elle est à l’ouest. Go west, young man ! L’ouest, c’est donc le désert.
Mais l’expression est à rapprocher d’autres, un peu plus anciennes : il est sous les palmiers, sous les cocotiers. Il fait comme s’il était en vacances perpétuelles, il vit dans un eldorado mental. Avec toujours cette idée que celui-là n’a pas le sens du réel, qu’il vit dans un monde tout bleu, édénique, qu’il prend ses désirs pour des réalités… Cf il vit sur son petit nuage.
Autre expression, peu répandue, glosée de façon un peu artificielle sur les précédentes, out of Africa qui, d’après Brigitte Kernel qui le cite, renvoie plutôt à quelqu’un qui est ivre ou sous l’emprise de la drogue. Littéralement il arrive d’Afrique, dans le sens il débarque (de la lune, ou autres. Mais la locution ne peut qu’imposer que grâce au souvenir d’un film de Sydney Pollack, tiré d’un roman de Karen Blixen. Et plus tout jeune (1985 pour le film). L’expression anglaise est déjà un calque d’une autre : out of nowhere, sorti de nulle part.
Quelques autres images familières du même tonneau ? Il est dans les choux, il est aux fraises.
Deux tournures qui évoquent quelqu’un qui n’y est pas, qui est ailleurs au lieu d’être ici. Même si les images sont plus potagères que géographiques, on a un sens assez voisin.
Encore que, pour ces deux dernières expressions, on aurait plutôt l’idée d’un état d’esprit provisoire : « Je n’avais pas dormi de la nuit ; j’étais dans les choux. On a joué au tarot ; j’étais aux fraises : les autres étaient beaucoup plus forts que moi » ( = j’étais largué).