CHANDELLE
Par: (pas credité)
PARLER AU QUOTIDIEN DU 23 JUILLET 2001
« Tenir la chandelle » : expression familière et très ancienne. Au sens propre (Littré) : « avoir des complaisances honteuses pour un commerce de galanterie ». En des termes plus actuels : « tenir la chandelle », c’est assister avec plus ou moins de satisfaction à des ébats amoureux. A l’origine (1830) cette expression n’impliquait pas l’intention de voir : il suffisait d’éclairer. Parmi les coutumes qui entouraient de prescriptions déplaisantes la nuit de noces, figurait celle qui imposait à un garçon d’honneur la tâche d’éclairer le coucher des mariés ; ce « chandelier » humain devait néanmoins tourner le dos.
La chandelle est une sorte de mèche tressée enveloppée de suif qui était autrefois le système d’éclairage des pauvres, les gens fortunés lui préférant la bougie faite d’une cire plus délicate qui venait de Bougie sur la côte algérienne (on disait une chandelle de Bougie, puis simplement une bougie). C’est peut-être parce que l’objet en lui-même a eu tant d’importance dans l’histoire des hommes que le mot chandelle a eu une telle fortune dans notre langue. On le retrouve dans quantité d’expressions.
La chandelle était, comme le vin et le pain, un objet essentiel de la vie quotidienne, il est donc lié à l’idée de valeur : la chandelle est précieuse, comme le pain et le vin. « Brûler la chandelle par les deux bouts » : dépenser à tort et à travers, gaspiller, mais aussi plus largement « se dépenser », « vivre avec excès ». Expression très ancienne qui date du XVIème.
A l’inverse, on peut vouloir faire des « économies de bouts de chandelle », c’est-à-dire des économies insignifiantes. Il est possible que l’expression vienne de l’habitude pour certains domestiques de revendre aux ciriers les bouts de chandelle et de bougies non consumées. L’idée de l’expression est non seulement celle d’économies inefficaces mais aussi de mesquinerie un peu sordide. (Cf Balzac : le Père Grandet, qui faisait des « économies de chandelles ».
Autre expression « le jeu n’en vaut pas la chandelle » qui dans l’usage courant signifie « cela n’en vaut pas la peine ni les frais envisagés ». Cette expression date du XVIème siècle, le jeu en question est à l’origine « toute activité où l’on a besoin de s’éclairer » (jeu de cartes ou de table…), : si le jeu n’est pas intéressant, il ne vaut pas la chandelle qu’on dépense pour l’éclairer. On est passé du domaine du jeu à tout type d’activité : « pour obtenir ce travail, il faudrait faire la cour au patron et au sous-chef : le jeu n’en vaut pas la chandelle ».
Et puis quand quelqu’un vous a rendu un grand service, vous a délivré d’une charge, d’un problème, a réglé une situation difficile, vous direz que vous lui devez une « fière chandelle ». Cela signifie que vous avez une dette de reconnaissance envers lui. A l’origine de cette expression, une pratique religieuse qui consiste à faire brûler un cierge à l’église pour remercier un saint de l’« aide » qu’il vous a apportée. Pourquoi « fière », le mot ne vient pas de l’adjectif fier, mais de fidare : confier, vouer, se fier, est il a une idée de fidélité, de foi : une fière chandelle : une chandelle que l’on fait brûler pour témoigner de sa foi en un saint.
Enfin pour finir en lumière : « voir 36 chandelles » : « être ébloui », « sonné », « j’ai fait une chute à skis, j’ai dévalé la pente les quatre fers en l’air, j’en ai vu 36 chandelles ! ».