GUERRE

Par: (pas credité)


PARLER AU QUOTIDIEN DU 19 SEPTEMBRE 2001

« Ce n’est pas une guerre, c’est le stade ultime du terrorisme classique », déclarait avant-hier le politologue Gérard Chaliand au quotidien Le Monde.

Et c’est un peu la question qui secoue les esprits, en ce moment : « Est-ce la guerre ou pas ? » « Est-ce une guerre ou pas ? » Le mot « guerre » convient-il ?
Pas encore évidemment : il n’y a pas d’hostilités déclarées entre deux nations, groupes de nations ou même groupes armés.
Mais de même qu’on dit « déclarer la guerre » (même si bien souvent, on ne la déclare plus), le problème est de savoir à partir de quel moment l’état de guerre est déclaré, est indéniable.
Et la guerre, ce n’est pas le terrorisme, ni la guérilla…

Le mot « guerre » n’appartient pas au plus gros réservoir de mots français : il ne vient pas du latin, mais c’est un mot francique, au départ, donc aux langues germaniques.
On sait que le phonème « gue » correspond dans les langues germaniques à « w ». Et en ancien français, on parle de werra. Mais la werra n’est pas vraiment la guerre. C’est l’état d’hostilité endémique qui existe entre des seigneurs rivaux et leurs obligés. Un duc contre un autre, un vassal contre un suzerain, un puissant contre le Roi de France… pendant à peu près tout le Moyen-âge, on guerroie bon an mal an, sans trop de mal d’ailleurs – peu de morts et de bonnes bagarres – et pourtant c’est une excuse aux pillages, à la terreur qui s’exerce contre les paysans, aux récoltes gâchées, aux réserves brûlées… Et pourtant, ce n’est pas du tout ce qu’on appellerait aujourd’hui la guerre.

Il semble que ce soit vers le XVIème siècle que le mot « guerre » prenne à peu près le sens qu’il a maintenant. Mais au-delà de tout ça, ce terme est bien souvent employé dans des sens figurés, plus ou moins éloignés de cette signification « technique ».
D’abord, on a quelques spécificités, par rapport aux types de guerres : de religion, civile, l’affreuse Guerre sainte…

Mais, on a de nombreuses expressions toutes faites, qui n’ont plus rien à voir avec une vraie guerre : « faire la guerre à… » (au tabac), ou « partir en guerre contre… » : s’opposer. C’est la même image que la croisade.
« De bonne guerre » : c’est normal, légitime, à propos d’une riposte. C’est fait dans les règles, conformément aux règles de la guerre… « Le marchand de vin s’est mis à vendre du fromage…. Alors le crémier, qui est juste à côté, propose maintenant un petit Bordeaux excellent et pas cher. C’est de bonne guerre »…
« De guerre lasse » = en renonçant à combattre. Ou en renonçant tout court. « J’ai attendu pendant deux heures dans l’antichambre, et puis, de guerre lasse, je suis reparti ».