CHAGRIN

Par: (pas credité)


PARLER AU QUOTIDIEN DU 11 DECEMBRE 2001

Voilà un mot bien ancien, mais encore tout à fait employé en français d’aujourd’hui. Un gros chagrin, par exemple, expression qui appartient souvent au vocabulaire enfantin… Le chagrin évoque bien un sentiment de tristesse et ses manifestations. Avec quelques spécialisations, comme le chagrin d’amour, expression convenue (et néanmoins fort utile), qui a d’ailleurs des équivalents : on parle aussi de peines de cœur. Mais attention, la nuance n’est pas exactement la même : le chagrin d’amour est un mot sérieux, voire compatissant. Si l’on parle de peines de cœur, on est plus volontiers ironique. Non que l’on considère que ces peines sont inventées… mais on les raille. D’ailleurs, le pluriel ne correspond à rien de particulier : « Il a des peines de cœur » ne signifie pas spécialement qu’il en a souvent, à répétition : le mot a valeur de singulier. Mais les expressions sont figées : on ne parle pas de peine d’amour (ou rarement) : il est vrai qu’on a quand même le titre de la pièce shakespearienne « Peines d’amour perdues ». Et on ne parle jamais de chagrin de cœur…


Chagrin s’utilise parfois en tant qu’adjectif : être un peu chagrin, avoir un esprit chagrin. Mais le sens n’est pas toujours le même : l’esprit chagrin voit toujours les choses en noir, voit le mal partout et se désespère de toute chose. Et c’est plus une disposition d’esprit qu’une tristesse dont la cause est précise. On dit également, en employant une expression au féminin « avoir l’humeur chagrine ».


Terminons avec le verbe chagriner, d’un emploi peu fréquent, mais assez distingué… parfois synonyme euphémistique d’ennuyer : « Ça vous chagrinerait de recommencer ce travail ? »
Attention, ne pas confondre avec la peau de chagrin, celle dont parle Balzac, par exemple, dans le roman du même nom. C’est là une réelle peau tannée, dont on se servait en maroquinerie.