PASSION
Par: (pas credité)
PARLER AU QUOTIDIEN DU 14 FEVRIER 2002
Ce mot qui a fait parler de lui, ces derniers temps, est courant, à la mode, et en même temps tout à fait paradoxal… Car il appartient à la même famille que des mots comme passif ou passivité. Et pourtant, les sens qu'il développe aujourd'hui, toutes les évocations qu'il suggère sont à l'opposé de l'idée de passivité…
En général, la passion recouvre l'enthousiasme très vif avec lequel on peut faire quelque chose…
On peut, par exemple, collectionner des timbres avec passion - ou passionnément - les deux formules sont presque équivalentes.
Mais, on dit également qu'on a la passion de la liberté ou la passion du pouvoir. Et là, ça s'apparente à un désir qui est plus fort que celui qui le porte: il l'emmène, le brûle… : celui qui a la passion de la liberté ne peut s'empêcher de la défendre, de lutter pour la faire prévaloir. Et celui qui a la passion du pouvoir ne peut s'empêcher de le rechercher, et ne se réalise qu'en l'exerçant. Le mot passion a donc un sens superlatif…
Et pourtant, le premier sens du mot est bien différent. Il est de la même famille que pâtir, qui dérive d'un verbe latin qui signifie souffrir. La passion désigne donc d'abord la souffrance, puis le fait d'être la proie d'un sentiment.
Et le mot s'est spécialisé pour désigner la Passion du Christ, sa souffrance sur la Croix, tout l'itinéraire qui aboutit à la crucifixion. La Passion du Christ est donc son supplice, ou le jour qui le commémore, en particulier le dimanche qui précède la fête de Pâques. Ou alors, le mot renvoie aux formes artistiques qui rappellent ces épisodes, et s'appuient par exemple sur les Evangiles : la Passion selon Saint-Matthieu et le Passion selon Saint-Jean sont deux grands oratorios de Jean-Sébastien Bach.
Au Moyen-âge, le mot a pris le sens de souffrance physique, en général. Et par une étonnante inversion, il a fini par désigner toutes sortes de sentiments forts, notamment l'amour : la passion amoureuse est encore tout à fait vivante.