CHARISME

Par: Yvan Amar et Evelyne Lattanzio

Mot à la mode, c’est sûr… Depuis, disons quinze ans… De plus en plus utilisé dans le langage courant, et souvent dans un contexte politique ou médiatique. Qu’est-ce que c’est ? Un genre de séduction, un magnétisme personnel, une aura, qui fait qu’on séduit son entourage, ou qu’on le stimule, qu’on le galvanise… On fait une impression, quoi… Et en général, une impression collective, sur un public, ou un groupe, bien plus souvent que sur une seule personne. C’est donc bien différent de la séduction individuelle…

Le mot vient du grec charisma, mot qui, au départ, désigne des dons spirituels extraordinaires : miracles, prophétie, visions… octroyés par la grâce divine. Le charisme est donc d’abord un terme de théologie. On parlait, jadis, du charisme d’infaillibilité du Pape, censé avoir reçu de Dieu, en tant que chef de l’Eglise catholique, ce don admirable de toujours juger juste, et de ne jamais se tromper. Mais, on parlait aussi bien du charisme de Sainte-Thérèse d’Avila, qui avait reçu le don de communiquer avec Dieu, ou de Bernadette Soubirou, dont les entretiens avec la Vierge Marie sont restés célèbres…

Actuellement, le sens a largement dévié : on est passé du sacré au profane… Et le charisme se restreint souvent à la capacité d’entraîner des gens derrière soi et de fédérer les bonnes volontés… Et la mode dont le mot bénéficie a profité du même coup à l’adjectif charismatique, souvent employé, à propos d’un personnage.

Le charisme ainsi redéfini rejoint donc un peu l’idée du « charme ». Ces deux mots ont la même origine, font partie de la même famille. Et charme, qui dérive de carmen, avait lui aussi, au départ, un sens sacré : chant sacré, oracle, sens qu’il a gardé assez longtemps. Et jusqu’au XVIIè siècle, il a clairement renvoyé à une idée d’influence divine.

Peu à peu, le mot a perdu cette référence, gardant pourtant de façon plus ou moins confuse l’idée de sortilège, d’envoûtement : exercer un charme, être sous le charme, un charme opère… « Sous l’effet d’un charme, il avait passé la nuit à chasser avec le Diable… et il ne s’était pas aperçu que cette chasse avait duré cent ans… »