FETE DES MERES/FAITES DES MERES

Par: Yvan Amar et Evelyne Lattanzio

Que dire, en clôture de cette fête des mères qui a probablement fait sourire d’attendrissement quelques millions de mamans qui ont reçu, hier matin, de la part de leurs charmants bambins des dessins maladroits tracés avec amour, des napperons brodés ou des poteries peintes à l’école, à moins que ce ne soit un flacon d’eau de Cologne acheté, en comptant ses petits sous ou ses quelques euros…

En tout cas, en guise de publicité sur la portière de certains taxis, cette fête des mères a donné aux Parisiens l’occasion de se refamiliariser avec un vieux jeu de mot. En effet, ces placards publicitaires proclament fièrement « Fêtes des mères, pas la guerre… ».
Etrange. Première référence, un slogan qui a fait florès, qui a été extrêmement populaire à la fin des années 60 et au début des années 70 : « Faites l’amour, pas la guerre ! » Cri de ralliement des enfants de 68, slogan d’abord américain, « make love, not war », rapidement traduit en français.

Alors, cette transformation de la phrase est étrange : elle repose sur un calembour : « fête des mères » s’écrit comme une « fête » f-ê-t-e ? Ça renvoie à la festivité. Mais, le mot est sous-entendu devant le deuxième partie de la phrase. Et pour que cette deuxième partie de phrase ait un sens, il faut imaginer ce « fête » orthographié « faites », l’impératif du verbe faire : « Faites la guerre ». Et, par contrepoids, on imaginera la première partie, « Fête des mères » comme s’il s’agissait de « faire des mères », d’en fabriquer, de rendre une femme mère… ce qui ne correspond pas, bien sûr, à ce que font les enfants…

Mais, ça nous remet en mémoire cette drôle de conjugaison du verbe faire, irrégulier à la deuxième personne du pluriel : Nous faisons, vous faites… et non vous « faisez »… ce qui est quand même une faute assez fréquente… chez les étrangers comme les francophones.
A souligner également, le fait que tous les dérivés du verbe faire se conjuguent de la même façon… Enfin tous les dérivés… il y en a fort peu…
Contrefaire, par exemple, c’est-à-dire imiter, plagier, ou singer… On dit : « vous contrefaites ». Le couple faire/contrefaire n’est donc pas du tout symétrique de dire/contredire. Car, là, on assiste à un divorce entre les deux verbes : on dit, je dis… vous dites… Mais, on dit je contredis/vous contredisez… ce qui est une exception tout à fait étrange… Mais, ça fait partie des charmes incongrus de la langue française…