ENFARINÉ
Par: Yvan Amar et Evelyne Lattanzio
Raffarin raffine… La France raffarinée… Les Raffarinades du Premier ministre…La période électorale intense que nous venons de traverser a pris fin. Et donc, paradoxalement, on va se permettre d’en parler moins… et parfois d’en parler davantage dans la mesure où il nous est maintenant permis de sortir d’une certaine neutralité obligée…
Et il est vrai que les commentaires, médiatiques ou privés, ne se privent pas de plaisanter avec ce patronyme. Ça se fait souvent avec des têtes et des noms nouveaux… et J.-P. Raffarin est encore, aujourd’hui, une tête nouvelle… Alors, on ironise sur son nom… Raffarin raffine, lisait-on à la une d’un grand hebdomadaire la semaine dernière. Cette syllabe finale en –in, sous la forme de ce qu’on appelle un voyelle nasalisée, se prête à la dérivation. Et au calembour : Raffarin raffarine… Raffarin raffine…
Mais le calembour sur raffinage… se double d’un autre, encore bien plus évident, avec farine… Cela va bien avec le côté apparemment rond du personnage, au style débonnaire et sans provocation. Enfariner signifie couvrir de farine… Et évoque, bien sûr, des images et des mots tels que embobiner, envelopper, et donc servir un plat, une réalité, présenter une situation de façon adoucie, amortie, sans angles saillants…. La farine adoucit les mœurs…
Maintenant, la France enfarinée évoque évidemment la figure enfarinée, et même, pour reprendre l’expression telle qu’on l’entend la plupart du temps, la gueule enfarinée… c’est-à-dire… avec une naïve confiance, sans se méfier le moins du monde…. (« Je suis arrivé la gueule enfarinée, un lundi matin, à mon bureau… La plaque sur la porte avait changé… Il n’y avait plus mon nom… J’étais renvoyé … Je n’avais même pas vu venir le coup »….)
Mais, enfariner fait penser aussi à une autre expression : « rouler quelqu’un dans la farine… » c’est-à-dire le tromper, lui faire croire des choses fausses, l’abuser par de belles paroles, mais surtout des paroles douces et lénifiantes, qui camouflent les vrais enjeux ou les vrais difficultés, ou les vraies aspérités… Toujours cette idée que la farine amortit la dure réalité… Mais aussi ce souvenir que la farine est à la base du masque de Pierrot… qu’il sert à se masquer et à se déguiser… même si c’est en clown…
Et ce mot de farine est souvent employé également comme synonyme de tonneau, d’acabit… dans des phrases comme… des mensonges, des histoires, des personnages de la même farine… du même ordre, quoi…. Et pour en rajouter encore sur la plaisanterie…. On peut le dire en latin : ejusdem farinae… dans un latin de cuisine, évidemment.