NOUVELLE STAGNATION

Par: Yavan Amar et Evelyne Lattanzio

Nouvelle stagnation, reprise sans emploi, récession égalitaire. Comme le souligne un récent article paru dans Libération, la crise de l’économie américaine se cherche un nom, n’ose pas exactement dire ce qu’elle est, et traduit son embarras et son hésitation par des formules particulièrement ampoulées…

Récession égalitaire, pour dire que le chômage peut toucher n’importe quel type de salarié, col bleu ou col blanc, ouvrier ou cadre, Américain d’en bas ou d’en haut (ou disons, d’assez haut). Et la récession, on le sait est un anglicisme qui désigne le ralentissement de la machine économique. Un mot qui souvent se veut moins inquiétant que crise, et moins durable. Récession égalitaire, en tout cas, même si l’expression souhaite montrer sa bonne volonté démocratique, n’est pas particulièrement rassurante. Pas plus d’ailleurs que reprise sans emploi.

Mais c’est la nouvelle stagnation sur laquelle je voudrais insister.
Nouvelle probablement parce qu’elle succède à la nouvelle économie, dont on a tant parlé à la fin des années 90.

Stagnation pourquoi ?
Le mot renvoie de toute façon à une image d’immobilité.
Il est intéressant du point de vue de sa sonorité : il ne se prononce pas de la façon qu’il s’écrit : le « g » est « dur ».
Quant à son sens, il est toujours péjoratif. Il s’agit non pas d’une immobilité tranquille, mais d’une immobilité par défaut, d’une immobilité qui est là alors qu’on attendrait une avancée, un mouvement, une progression. Et le mot correspond un peu au proverbe « Qui n’avance pas recule. » Comme il est bien souvent associé à une image d’eau stagnante (mare, étang), il fait penser à une culture microbienne, bactérienne qui peut s’y développer à l’aise, et qui rend la baignade impossible, dangereuse et pathogène. La stagnation, c’est l’immobilité qui s’enfonce…