MAKING OF

Par: Yvan Amar et Evelyne Lattanzio

Le premier festival du « making of » s’est tenu le week-end dernier à Romorantin. Que d’exotisme donc dans nos provinces, et comme cette pittoresque petite ville se retrouve aux avant-postes de la mode ! qu’est-ce donc qu’un making of ? C’est un film documentaire sur un tournage. Donc, c’est le film d’un film. C’est un petit film mémoire qui saisit l’ambiance, les coulisses, le déroulement de cette grande machinerie qu’est le tournage d’un « vrai » film.

L’un d’eux au moins fait carrière, c’est « Lost in la Mancha », qu’on peut voir en ce moment, non pas dans le cadre d’un festival, mais dans des salles publiques, et qui retrace le désastre que fut le tournage d’une grande production consacrée à Don Quichotte, qui n’a pu être menée à terme.

Revenons à notre mot… Pourquoi « making of » ? Ces deux mots anglais signifient mot à mot fabrication de…, et leur réunion pour en faire une expression en soi est bien typique de la langue anglo-américaine. On a donc là presque un anglicisme au carré : par les mots, mais aussi à cause de cette syntaxe particulière…

Que pourrait-on trouver en cherchant des équivalents ? Un journal… oui, d’une certaine façon… Comme on tient le journal d’une expédition, d’une recherche, d’un voyage. Ou un album… Souvent, on utilise de mot pour désigner le livre où l’on va coller des photos pour garder des traces, des souvenirs, une sorte de réécriture partielle et subjective d’une expérience ou d’une période… Pourquoi « album » ? Le mot vient d’un adjectif latin qui signifie blanc, et qui a d’abord été utilisé pour l’album amicorum, le livre blanc des amis, qu’on faisait signer aux amis… ou aux personnalités qu’on était fier d’avoir rencontrées. Mais l’album est personnel…
Et le journal est, en général, écrit par un protagoniste de l’action. On peut imaginer un journal du tournage du Cuirassé Potemkine par Eisenstein, etc. Ce qui est particulier dans le making of, c’est qu’il est réalisé par une petite équipe extérieure au tournage lui-même. Et qu’il est l’une des dernières manifestations de cette tendance étonnante à tous les gens d’images et de média à se prendre eux-mêmes comme sujet de leurs productions.