PAPE
Par: Yvan Amar et Evelyne Lattanzio
Vingt-cinq ans de papauté… ça se fête… ça a donc été fêté…. Ça nécessite peut-être aussi quelque éclairage sur le mot « pape », un mot qui fait rêver, qui fait sourire, qui porte une image multiple et contrastée… Contrastée, d’abord, parce que la fonction papale évoque une certaine dignité, un apparat, et tout un appareil de respect qui s’installe autour de la personne papale. Mais, que d’un autre côté, le mot « pape » est un mot de formation populaire… Et presque enfantine…En effet, le mot « pape » est une dérivation de l’appellatif Papa (en grec byzantin, pappas…), un mot familier et tout à fait enfantin, plein d’affection, de respect, peut-être mais aussi de proximité. « Papa »… ce n’est pas « père»… En latin, le mot « papa » a signifié plus précisément père nourricier, image symétrique de la mère nourricière, qui donne aussi l’image d’un parallélisme entre la vie matérielle et la vie spirituelle. Le Pape de l’Eglise « nourrit » le croyant… L’image paternelle, en tout cas, ne fait pas de doute, puisque le Pape, on sait bien que c’est le Saint Père, le père de tous les chrétiens…enfin des Catholiques romains, tout au moins…
Un peu d’histoire alors… Le terme « Papa » est employé très tôt, en grec, pour désigner les évêques puis, plus spécialement, à l’intention du seul évêque de Rome. Le Pape devient donc unique, alors même que les prêtres de l’église orthodoxe grecque sont nommés popes, et que c’est, bien entendu, la même image qui est à l’œuvre…
Les dérivés… sont peu nombreux, mais il y en a : « papauté » renvoie à la fonction, à la dignité du Pape (ça correspond à peu près à royauté… avec la même relation au mot « roi « ). Mais aussi à la période durant laquelle un Pape occupe sa fonction (et là, ça correspond à « règne »… « Durant la papauté de Pie VII… ».
Le féminin existe, même si la fonction est a priori uniquement masculine… on parle de « papesse » pour évoquer une dérive possible de la fonction (de même qu’on peut parler de « moinesse »…) et on se souvient, bien entendu, de la papesse Jeanne…
Autre mot péjoratif, « papiste », qui désigne les catholiques romains, soumis à l’autorité du Pape… mais biens sûr, le mot ne se trouve pas sous la plume ou dans la bouche de ceux qui rejettent cette autorité, tout en se réclamant du christianisme. C’est donc un mot de guerres de religion, employé notamment par les Huguenots…
Il faut évidemment terminer avec la « papamobile », vocable plaisant inventé pour désigner la voiture du Pape…
Pou finir, voyons si ce mot de « pape » a quelques utilisations figurées… On dit « sérieux comme un Pape », c’est-à-dire ayant ou plutôt affectant une mine très sérieuse, très pénétrée de sa propre importance… L’expression est ironique et ne s’emploie que lorsqu’on trouve que cette dignité n’a pas lieu d’être, que cette gravité est exagérée, voire un peu prétentieuse… Celui qui est « sérieux comme un Pape » manque de distance par rapport à sa fonction, d’humour par rapport à sa personne…
Et le Pape du surréalisme, André Breton, que souvent on a désigné comme ça, montre bien qu’on peut user du nom pour parler de l’inspirateur d’un groupe, d’une école qui tient à son magistère, à sa tyrannie, et impose un certain nombre d’idées et d’attitudes.