LAIQUE

Par: Yvan Amar et Anne-Cécile Bras

Les querelles et les interrogations politiques et sociales font constamment entendre ce mot de laïque : école laïque, république laïque, et même celui de laïcité qui représente actuellement une valeur dont les contours ne sont pas exactement les mêmes pour tout le monde.

Le mot s’oppose à « religieux ». On parle d’une école (le plus souvent) mais aussi d’un hôpital, d’une colonie de vacances, d’une institution destinée à aider les plus démunis, qui sont laïques quand ils fonctionnent en dehors de toute idéologie ou croyance religieuse. Et non seulement on parle d’une école laïque, mais on parle de l’école laïque, l’école gratuite que l’Etat met à la disposition de tous les enfants qui vivent en France.

Quant à la laïcité, c’est ce principe qui veut que ce que l’Etat met à la disposition des habitants ne transmette pas une pensée religieuse, ne fasse pas de prosélytisme et ne soit pas soumis à une pratique religieuse de la part du bénéficiaire. D’où le débat sur les signes visibles d’appartenance à une confession particulière.

Souvenons-nous quand même que cette idée de laïcité se comprend par rapport à une histoire particulière qui est celle de la République française… Quand on demandait à un grand traducteur brésilien un mot qui représente, à son avis, l’intraduisible culturel, ce qui ne peut avoir d’équivalent d’une langue à une autre, dans la mesure où l’histoire n’est pas la même dans les deux pays, il citait ce mot de « laïcité ».

Et le mot « laïcard », familier en français, mais qu’on entend dans les diatribes politiques, mot plein de haine et de ressentiment le plus souvent, montre bien que ces idées et les mots qui les disent sont liés à un certain débat politique. Les « laïcards » sont les tenants de la laïcité, mais désignés et montrés du doigt par leurs opposants. Et ces opposants ont longtemps été ceux qui souhaitaient que l’école religieuse et catholique celle qu’on appelle, -ou, le plus souvent, qui s’appelle elle-même- l’école libre, soit favorisée par rapport à l’école laïque.

Un mot d’orthographe d’abord, puisque ce mot, en tant qu’adjectif, s’écrit parfois laïc au masculin. Mais, cette orthographe est nettement plus rare que l’autre. Le mot au départ, n’a pas de rapport avec la religion. « Laïcus », en latin, signifie « du peuple ». Avec deux spécialisations :
• qui n’appartient pas à l’armée… et aujourd’hui ce sens, totalement disparu est assuré par l’adjectif civil.
• illettré, non clerc.

C’est ce dernier exemple qui nous permet de comprendre la dérive de sens. Pendant longtemps, ceux qui savaient lire et écrire étaient presque tous des membres du clergé (à part une partie de la noblesse…) : il n’y avait d’école qu’au sein de l’église…

Mais, il existe un autre adjectif qui, en français moderne, s’oppose à « religieux » : c’est « profane ». Mais son emploi est bien différent de celui de laïque. Aucun emploi politique ou social d’abord. Et ensuite, il s’utilise essentiellement dans le domaine artistique, ou il est plutôt symétrique de l’adjectif sacré : musique profane/musique sacrée, éloquence profane/éloquence religieuse, etc.