EXCES
Par: Yvan Amar et Anne-Cécile Bras
Les ministres en excès de vitesse ! On se moque, on se moque… soit, mais qu’est-ce qu’un excès de vitesse ? C’est quand on va trop vite. On a dépassé la vitesse autorisée.Et ce mot même d’excès est toujours lié à l’idée de dépassement de la limite fixée. Il indique qu’on est dans le domaine du « trop ». Pourtant son origine latine ne le prédisposait pas à cette valeur particulière : excedere (qui a donner excéder) veut, au départ, dire « sortir de ». Mais, bien vite, (et déjà en latin), le mot se spécialise dans le sens de sortir de la norme, et donc dépasser les bornes…
Et, en français, quand on parle d’excès, on signale donc un dépassement qu’on condamne. Le mot appartient à un vocabulaire plutôt moralisateur et qui condamne ce qui outrepasse la règle ou la loi. Tout spécialement quand cet excès est le résultat d’un laisser-aller, d’un appétit qu’on a laissé se débrider, qu’on n’a plus contrôlé… Se livrer à tous les excès. On pense à des excès de boisson, à des ripailles, à des débauches… c’est le réveil de la bête qui sommeille en l’homme…
Mais attention, le mot excès peut être prononcé, les lèvres pincées. Lui qui stigmatise, qui condamne, qui dénonce la démesure est un mot très mesuré, prononcé en général par celui qui n’a pas commis l’excès. C’est le mot de la loi et de la morale, et souvent de l’administration.
Le mot excès n’est pas seul dans sa famille.
L’adjectif excessif lui correspond. Il désigne souvent un défaut… Pas forcément celui qui se livre à des excès… Mais celui qui est emporté, souvent coléreux… ou simplement porté aux extrêmes. « Il est en retard ? Il sera renvoyé sur le champ ! – Mais Monsieur le Directeur, cela fait 27 ans que Monsieur Albert travaille ici… Et son premier retard… - Renvoyé sur le champ, vous dis-je ! » Et voilà un Directeur excessif… Mais attention, l’adjectif peut s’appliquer à autre chose qu’un défaut humain… Notamment à une somme d’argent, un prix, qu’on trouve trop lourd… « Cinq euros, la botte de carottes nouvelles… C’est un peu excessif… »
Quant à l’adverbe excessivement, qui signifie en principe « trop », il est souvent employé comme un superlatif, avec le sens de « très très…» : « C’est excessivement agréable, ici… » Glissement de sens, certes, condamné par les puristes de la langue française, certes… mais qu’on entend malgré tout.
A côté d’excès, on trouve un autre nom commun, excédent, qui n’a pas du tout le même sens. Excès a un sens abstrait. Excédent a un sens concret. Il désigne une quantité, ce qui déborde une prévision, par exemple. On parle des excédents de production… ce qui a été produit, mais n’a pas pu se vendre… Et là, aucun écho moral !
Alors que le verbe excéder a souvent le sens particulier d’exaspérer : « Tu m’excèdes !… » C’est-à-dire tu vas au-delà de ma patience…