LE BLUES

Par: Yvan Amar et Anne-Cécile Bras

The soul of a man… Titre anglais, conservé en anglais, pour un film qui vient de sortir en France. Un film de Wim Wenders, produit par Martin Scorsese, qui est un film musical. Et le titre anglais lui a été conservé, un peu comme si c’était une chanson, qu’on ne traduit pas.
Et le film parle de l’histoire du blues, à travers trois personnalités fortes qui ont illustré ce genre : Blind Willie Jefferson, J.B. Lenoir, Skip James…

Le blues : encore un mot anglais, américain plutôt, qu’on a conservé tel quel en français, à tel point que cet anglicisme fait maintenant partie du vocabulaire musical français.
Musical et même psychologique : on dit – même s’il y a là un effet de mode, même si on pense que ce tic de langage est destiné à passer – on dit « j’ai le blues » pour dire « j’ai le cafard ». C’est une utilisation assez pertinente du mot qui a, à peu près, le même sens aux Etats-Unis : I’ve got the blues, ou I’m blue

C’est que le blues est un nom, qui dérive d’un adjectif, blue, littéralement bleu, associé depuis longtemps à la tristesse : the blue devils (les diables bleus) correspondait aux idées noires. L’expression anglaise a, d’ailleurs, été assez à la mode en France, à une période très anglophile de la première moitié du 19è siècle, avant de tomber dans l’oubli des mémoires françaises. Mais l’image continue sa vie en Angleterre et en Amérique : « The blues » suit le parcours d’un adjectif substantivé, remplaçant blue devils, et donc prenant la marque du pluriel. Et bizarrement, il a fini par être considéré comme un nom singulier, tout en conservant cette marque du pluriel.
Mais à pas de velours, il a également quitté la sphère psychologique, pour entrer dans le monde de la musique. Avec des sens assez différenciés.

Le blues est d’abord un genre musical, né au début du 20è siècle, première expression individuelle de la musique noire américaine, à côté de formes nettement plus collectives : musiques d’église et chants de travail. Le blues, lui, traditionnellement plainte amère, chante la misère, l’oppression, la dureté de la vie, les peines de l’amour… et s’exprime essentiellement par la voix, la guitare, l’harmonica.

Le blues renvoie aussi à un certain climat musical, caractérisé par le recours aux « blue notes », ces notes qui échappent aux degrés de la gamme occidentale, et qui sont l’un des signes des origines africaines de cette musique.

Le blues, enfin, est une forme musicale assez précise, le plus souvent structuré sur douze mesures, divisées en quatre fois trois, et qui dans le jazz, peut s’utiliser quelque soit la formation instrumentale.