MANDAT
Par: Yvan Amar et Anne-Cécile Bras
Alain Juppé garde tous ses mandats. Au moins jusqu’au procès en appel qui soit définitivement statué sur son sort politique. Ses mandats ? C’est-à-dire les fonctions pour lesquelles il a été élu, à la mairie de Bordeaux, par exemple.Un mandat est donc une fonction qu’on remplit lorsqu’une élection vous a confié cette tâche. Le mot correspond donc au fait qu’on vous ait confié cette responsabilité, au travail qu’elle implique, mais fait aussi souvent allusion à la durée durant laquelle on est responsable. Avec la réforme du quinquennat, le mandat présidentiel en France a donc été réduit à cinq ans.
Mais, le sens du mot mandat est lié à celui de représentation : l’élu représente ses électeurs. Il défend leurs idées (tout du moins, celles de la majorité qui lui a donné son pouvoir). Un mandat n’est donc pas un blanc seing, ou un chèque en blanc, deux expressions figurées qui signifient qu’on a tout pouvoir, qu’on peut tout se permettre. Elles sont d’ailleurs presque toujours prises à la négative (« Nous n’avons pas donné un blanc-seing au président de région… »).
C’est intéressant d’un point de vue linguistique, car les trois expressions mandat, blanc-seing et chèque en blanc renvoient, dans un autre contexte, à trois objets symétriques : le mot mandat, à partir du XIXème siècle désigne une sorte de chèque qu’on envoie par la poste, un papier qui, donc, représente de l’argent. C’est le cas d’un chèque, bien sûr.
Quant au blanc seing, c’est littéralement un papier blanc et signé. On a donc toute latitude d’écrire ce qu’on veut au-dessus de la signature, comme si quelqu’un vous autorisait à faire… tout ce qui vous plaît à noter sur cette autorisation.
Lorsqu’on est élu pour remplir une fonction, on peut dire qu’on est mandaté. On est un mandataire, qui représente ses mandants… Ces mots, assez peu fréquents sont assez usuels, dans le vocabulaire syndical. Et ils renvoient à un autre mot de la même famille, le vieux verbe mander, qui représente à l’origine l’image de donner la main (manum dare) en signe de confiance, et de délégation de pouvoir. Pourtant, il a eu plusieurs significations : il est, au départ, synonyme de quelques verbes qui lui ressemblent : demander ou commander. Mais veut également dire convoquer (Madame la Marquise a mandé son page) ou faire savoir par lettre (on le lit beaucoup dans les lettres de la Marquise de Sévigné).