DEDIER

Par: Yvan Amar et Anne-Cécile Bras

Un disque entièrement dédié à la musique de Duke Ellington... une soirée dédiée à l’analyse des élections… Voici des façons de parler qu’on entend couramment, et qui, même si elles tendent à se répandre, constituent encore des fautes. Car le verbe dédier est utilisé ici avec un contresens : il faudrait dire consacré, ou réservé.

Alors comment comprendre cet emploi récent ? Il s’agit visiblement d’un anglicisme, d’un emploi du verbe dédier sur le modèle du verbe anglais dedicate : an evening dedicated to poetry… uns soirée consacrée à la poésie.. on pourrait même dire, dans un français très recherché, « dévolue » à la poésie…

Mais l’affaire est délicate… Est-ce vraiment une faute ? En tout cas, dédier et le verbe anglais dedicate ont bien la même origine : le dedicare latin.

Alors quel est le sens traditionnel de dédier en français ? Par exemple, on dédie un temple à Jupiter. C’est-à-dire que par une cérémonie rituelle, on déclare qu’il servira de lieu au culte de ce dieu. Et que d’ailleurs toute son existence est un hommage à Jupiter. On peut également dédier une prière à un dieu : la lui adresser. Ou encore dédier une œuvre à quelqu’un… c’est plus profane : c’est déclarer qu’elle a été composée pour lui, qu’il en est le destinataire premier…

Et attention, dédicacer un livre a en français un sens différent : il s’agit, une fois le livre écrit, et édité, d’y apposer sa signature, après un petit mot gentil, en témoignage d’amitié à un admirateur… ceci sur un seul exemplaire, qui lui est destiné