BARON

Par: Yvan Amar et Anne-Cécile Bras

Après les barons du gaullisme et les barons de la finance, voilà que les barons de la drogue occupent la scène médiatique. Il s’agit, donc, à l’évidence de personnages importants, plutôt les gros poissons que le menu fretin. Et il est étrange que ce mot de « baron » ait pu prendre un tel sens alors qu’il occupait l’avant-dernier rang dans la hiérarchie nobiliaire : Chevalier, baron, vicomte, comte, marquis, duc, prince, et ensuite… mon Dieu, irons-nous jusqu’aux princes du sang, au roi, etc.

Pourtant, à l’origine, le baron n’a rien d’obscur : dans la première hiérarchie féodale, et désigne un grand seigneur du royaume.

Voilà l’un des rares mots empruntés au francique ; et dans cette langue, à l’origine, le baron est un « homme libre ». La tradition nobiliaire a pu ensuite lui réserver un sort plus modeste. Mais la langue anglaise, et même américaine, a redoré son blason : un baron est un magnat, c’est-à-dire un personnage tout puissant, et surtout dans la presse et l’industrie.

On notera également qu’en France, et dans une langue argotique, le baron est un comparse, un compère.
Au jeu du bonneteau, par exemple, c’est un complice du maître du jeu, qui feint d’être un passant, un joueur comme un autre. Il va jouer, et bien souvent gagner. Et donner ainsi confiance aux autres, qui ainsi vont imaginer que gagner n’est pas si difficile, que le jeu est honnête, que tout le monde a sa chance.
Ou alors c’est celui qui fait semblant d’être le passant choisi au hasard pour répondre au magicien, à l’illusionniste : « Prenez une carte ; ne me la montrez pas, remettez-la dans le paquet… »