BRAS DE FER

Par: Yvan Amar

Un nouveau préfet vient d’être nommé à la tête de la Préfecture de Paris. Ce sera Pierre Mutz, et non pas Claude Guéant. C’est-à-dire que ce sera la personnalité soutenue par le Président de la République et non celle qui avait les faveurs du ministre des Finances. Et pour citer la presse d’hier, cette nomination a fait l’objet d’un long bras de fer entre Jacques Chirac et Nicolas Sarkozy. Un bras de fer ! En voilà une expression imagée… qui exprime bien l’idée d’un affrontement vif entre les deux hommes politiques. Vif et qui dure…. Quand chacun campe sur sa position. Quand aucun des deux ne veut céder. Pas de dialogue, pas de discussion, pas de négociation. Et, d’ailleurs, l’expression s’emploie souvent dans des cas où il est impossible d’abandonner un pouce de terrain… ou deux ou trois… On cède ou on ne cède pas … On est donc dans une logique du tout ou rien. On l’emporte ou l’on plie… Et c’est bien l’image… Il y a celui qui fait plier et celui qui plie.

« Plier » ou « faire plier »… C’est bien de cela qu’il s’agit dans le jeu… ou l’épreuve physique qui est à l’origine de l’expression. On l’a tous fait… ou presque ; on a tous lancé ou relevé ce défi un peu bête : les adversaires s’assoient face à face, posent leur coude sur la table, avant-bras contre avant-bras, main contre main. Et on pousse… Jusqu’à ce que l’un des duellistes fasse pencher l’autre, amène son avant-bras contre la table.

Pourquoi « bras de fer » ? L’image est fréquente pour évoquer la force, la solidité… le fer, c’est solide… L’image du bras est-elle aussi fréquente ? On la trouve à plus d’un détour de phrase, représentant l’autorité et la force, le bras symbole de la personne… Rappelons-nous le Cid : « Ce bras qu’avec respect toute l’Espagne admire/ Ce bras qui, tant de fois, a sauvé cet empire/ Tant de fois raffermi le trône de son roi/ trahit donc ma querelle, et ne fait rien pour moi ? Il s’agit ici du bras qui tient l’épée, d’un bras à deux bouts, pourrait-on dire… D’un côté, il aboutit à l’épée qui est son prolongement… De l’autre, il aboutit à la volonté qui l’anime… Il est donc comme le moyen terme entre l’arme et l’esprit…, vrai symbole de la force…

Mais, le bras, plus souvent encore, est symbole de l’activité… quand il s’anime, et de la passivité ou de l’abandon quand il reste inerte… : les bras ballants (= sans avoir rien à faire)… les bras croisés (quand on n’a rien à faire.. ou qu’on refuse délibérément de faire quoi que ce soit, en particulier, de travailler, de s’activer…) Ou même baisser les bras : renoncer à lutter, reconnaître qu’on ne pourra rien faire contre une situation qu’on déplore…