OUISTES ET NONISTES
Par: Yvan Amar
Les deux mots sont apparus lors de la dernière campagne pour le référendum. Oh je vous l’accorde, on les avait déjà parfois rencontrés auparavant… Mais, à cette occasion, ils se sont réellement répandus dans tout le vocabulaire politique et médiatique. Vont-ils durer ? Se sont-ils suffisamment cristallisés pour résister à l’éphémère de l’actualité ? Probablement pas ! Mais ils tiennent, pour l’instant, le haut du pavé linguistique… ce qui s’explique politiquement… A l’ordinaire, les tenants du oui et du non avant un referendum sont répartis plus harmonieusement, selon leurs engagements politiques... Mais, là justement… les oppositions se jouent des frontières politiques ordinaires. Donc, au sein d’une même formation, et même parfois d’une même sensibilité, d’une même famille parfois… on se range d’un côté ou de l’autre… Donc, il faut une étiquette de plus… Et ces deux mots, courts, visiblement fabriqués pour l’occasion, permettent de se repérer. D’autant que les deux mots sont délibérément fantaisistes et amusants… Ne serait-ce que d’un point de vue sonore. Ouiste… Ouiche !… Ça c’est rigolo. D’autant que le sens du mot ne se comprend que par rapport au contexte… Oui à quoi ? Non à quoi ?Car c’est bien ça le principe de formation de ce genre de mot… Le suffixe –iste marque bien l’adhésion à une certaine idée, à un personnage, à un système de pensée… Positiviste, gaulliste, monarchiste. Une adhésion et même un certain militantisme. Ce type de formation s’est tant répandu, ces dernières décennies, que bien sûr, il donne lieu souvent à quelques plaisanteries, ou à quelques souplesses dans la formation du mot... Par exemple, à partir d’un mot non français, même s’il est compris dans notre langue : macho donne machiste.
Ou à partir non pas d’un seul mot, mais d’une expression : les « jusqu’auboutistes ». Un mot qui s’est bien ancré, en français, et qui date de 1916, époque à laquelle il ne désignait que ceux qui étaient partisans de la guerre à outrance, jusqu’au bout, quelles qu’en soient les conséquences et les pertes.
Le « je-m’en-foutiste » est plus ancien encore, puisqu’il date de 1880… L’ « aquaboniste » est né avec Serge Gainsbourg… Mais, la série est loin d’être close, notamment dans le domaine politique. Songez donc aux « toutistes »… Qu’est-ce cela ? Une nouvelle forme d’opportunisme encore bien plus terrible que celle qu’on connaissait jusqu’alors…. Le « toutiste » est celui qui se rallie à toute idée, à tout parti, à toute personnalité, pourvu qu’elle lui assure quelques avantages.
Mais, de façon plaisante, cette suffixation est très vivante, en ce moment. Et on parlera facilement de « flantiste » pour celui qui sait bien faire les flans ou de « tartiste » pour celle qui sait bien cuire les tartes…