LITTERISME
Par: Yvan Amar
Le terme de littérisme vient d’être entériné très officiellement par la Commission générale de terminologie et de néologie, sous l’égide du Ministère de la Culture… Est-ce que ça veut dire qu’il entre dans la langue française par la grande porte ? En tout cas, il n’entre pas par l’entrée des artistes… mais par l’entrée officielle. Ce n’est pas son usage qui fait qu’on l’accepte… mais plutôt le besoin qu’on avait de lui… Il y avait un poste à pourvoir, quelques candidats… et il l’a emporté…Alors, quel était ce poste à pourvoir ? Eh bien voilà : on n’avait pas de terme en français pour désigner le contraire l’illettrisme… Ni d’ailleurs, pour désigner le contraire d’analphabétisme. L’anglais a le mot literacy que souvent, faute de mieux, on employait jusqu’à maintenant… Ce n’était pas si mal… ceux qui l’utilisaient le comprenaient (c’est un terme assez spécialisé… donc en usage entre personnes qui s’occupent des mêmes choses et utilisent le même jargon…). Mais, les pouvoirs publics ont jugé bon de donner un terme plus français à notre langue… et de ne pas se contenter du calque anglophone, ce qui semble logique : en anglais, literacy est le pendant d’illiteracy… Alors que cette symétrie n’existe pas en français.
Alors venons-en maintenant à son sens… Le littérisme est la capacité à lire un texte simple en le comprenant, à utiliser et à communiquer une information écrite dans la vie courante » pour reprendre les termes mêmes du communiqué de la commission de terminologie... C’est-à-dire, en deux mots que le littérisme est le fait de savoir lire… Et c’est tout ? Non justement, c’est un peu plus élaboré : c’est le premier niveau dans la maîtrise de la lecture. Et la définition est assez éclairante… elle part de l’usage de l’écrit… Elle ne dit pas qu’il s’agit de savoir lire et écrire (ces expressions font un peu Troisième République…) Elle précise : lire un texte simple… et… non pas écrire un texte simple, mais communiquer une information écrite dans la vie courante… Pour sentir le jargon, ça sent le jargon… Mais, en même temps, c’est un indice de modestie : une fois qu’on sait faire ça… on peut franchir d’autres degrés… Alors que si l’on parle uniquement de « savoir » lire et écrire… on a l’impression qu’on est dans le tout ou rien… Ou bien on sait, ou bien on ne sait pas, un point c’est tout.
Et pour mieux comprendre cela, on peut se souvenir de la différence qui existe en analphabétisme et illettrisme : L’analphabète n’a jamais appris à lire ni à écrire. Il n’a jamais eu accès au code. Pour lui, l’écrit est totalement illisible. Alors que l’illettré a plutôt oublié… Il a appris, mais n’a pas suffisamment pratiqué pour que le savoir-faire se fixe. Les résultats de l’apprentissage se sont donc évaporés… plus ou moins… Mais pas toujours totalement... Et s’il s’agit de réapprendre, ça ira bien plus vite…
Un dernier mot sur les mots qui manquent justement… On a un nom, un concept, le littérisme… On n’a pas d’adjectif qui lui corresponde, et qui s’oppose à illettré ou à analphabète… Mais en cherchant… on en trouvera bien un !